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L'Etat en jeu - fasopo

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modalités d’action politiques et des règles d’accès aux ressources, repérable dans<br />

l’int<strong>en</strong>sification et la généralisation de l’usage de la viol<strong>en</strong>ce. Celle-ci devi<strong>en</strong>t une modalité<br />

d’action et d’accumulation de ressources. Nous faisons l’hypothèse que les activités de<br />

viol<strong>en</strong>ce apparaiss<strong>en</strong>t dans des configurations locales et nationales spécifiques des rapports de<br />

forces politiques et s’articul<strong>en</strong>t aux possibilités d’accès aux activités de captation et à leurs<br />

formes. Les logiques de la mise <strong>en</strong> œuvre d’activités de viol<strong>en</strong>ce physique ne s’autonomis<strong>en</strong>t<br />

que marginalem<strong>en</strong>t de celles des <strong>jeu</strong>x politiques et étatiques. Ces activités dev<strong>en</strong>ant une<br />

modalité d’action et d’accumulation de ressources, elles modifi<strong>en</strong>t les rapports de forces<br />

locaux et nationaux, et contribu<strong>en</strong>t à l’int<strong>en</strong>sification de la désobjectivation de l’<strong>en</strong>semble<br />

étatique.<br />

Les forces de l’ordre sont très rapidem<strong>en</strong>t dépassées, elles ne bénéfici<strong>en</strong>t pas des<br />

moy<strong>en</strong>s nécessaires au rétablissem<strong>en</strong>t de l’ordre dans un contexte de multiplication et de<br />

dépacification des mobilisations. Dans les rues, les altercations armées se multipli<strong>en</strong>t, les<br />

étudiants se batt<strong>en</strong>t quotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t. Des unités armées se constitu<strong>en</strong>t, qui se spécialis<strong>en</strong>t<br />

dans les opérations d’intimidation ou d’élimination à l’échelle d’un quartier, d’une ville,<br />

d’une province ou du pays. En Anatolie c<strong>en</strong>trale, des milices sont créées et serv<strong>en</strong>t les intérêts<br />

des systèmes d’action locaux <strong>en</strong> homogénéisant politiquem<strong>en</strong>t les quartiers, <strong>en</strong> interv<strong>en</strong>ant<br />

dans leurs flux économiques, et <strong>en</strong> obt<strong>en</strong>ant la participation des populations aux activités des<br />

organisations des systèmes d’action locaux. Les sections locales des deux camps adopt<strong>en</strong>t des<br />

tactiques de substitution aux pouvoirs publics et de contrôle territorial. La substitution se<br />

réalise par l’opposition armée ou la collaboration avec les municipalités qui accept<strong>en</strong>t de<br />

déléguer le mainti<strong>en</strong> de l’ordre et le contrôle social aux milices. Des sections de mouvem<strong>en</strong>ts<br />

extraparlem<strong>en</strong>taires pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ainsi le contrôle territorial des nouveaux quartiers des grandes<br />

villes, que les municipalités ne peuv<strong>en</strong>t intégrer à leur action par manque de moy<strong>en</strong>s. Des<br />

quartiers <strong>en</strong>tiers sont soustraits à l’autorité de l’Etat et gardés par des militants armés. Les<br />

activités de viol<strong>en</strong>ce devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t « des leviers d’accumulation de ressources économiques et<br />

politiques, de contrôle social et territorial, […] des instrum<strong>en</strong>ts d’exercice du pouvoir » 142 .<br />

Elles s’épanouiss<strong>en</strong>t dans les interstices qu’offre la faiblesse des moy<strong>en</strong>s de l’Etat. Mais elles<br />

ne se réalis<strong>en</strong>t pas « malgré » l’Etat, puisqu’elles se pér<strong>en</strong>nis<strong>en</strong>t grâce aux contacts dont les<br />

groupes dispos<strong>en</strong>t dans son appareil. C’est grâce aux relations collusives <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ues avec les<br />

protagonistes des arènes officielles que se développ<strong>en</strong>t ces activités. Nous montrerons que les<br />

142 Briquet, Jean-Louis, Favarel-Garrigues, Gilles, « Introduction. Milieux criminels et pouvoir politique », in<br />

Briquet, Jean-Louis, Favarel-Garrigues, Gilles, Milieux criminels et pouvoir politique. Les ressorts illicites de<br />

l’Etat, op. cit., pp. 11-12.<br />

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