La civilisation égéenne - Tome 1 - Numilog

194 LA CIVILISATION ÉGÉENNE
Dans les Cyclades, les principaux moyens de transport étaient les
bateaux de toute espèce - de commerce, de pêche, de navigation -,
certains à voiles, d’autres à rames, et la plupart combinant ces deux
moyens. On est surpris de voir que dans les Cyclades, il y ait eu si tôt
des bateaux aussi longs et comportant tant de rames. Ils étaient souvent
représentés sur les ustensiles en forme de a poêles à frire N de la phase
de Syros-Kéros : une proue très haute, presque verticale mais avec une
forte courbure - qui a souvent comme emblème un poisson et un
ruban à franges qui pend -, une coque très longue, légèrement courbe
et souvent décorée de bandes qui aboutissent a une poupe basse, quel-
quefois recourbée au sommet avec, à l’extrémité, un éperon qui sort à
peine de l’eau ; peut-être cela aidait-il les hommes d’équipage à embar-
quer et à débarquer, si l’on en juge d’après l’évolution ultérieure. Les
nombreuses rames étaient représentées par de petites lignes très serrées,
de chaque côté ; dans certains cas, une rame plus grande, à l’arrière,
servait de gouvernail. De tels bateaux devaient pouvoir assurer la
grande navigation et voyager facilement vers l’Égypte et les côtes anato-
liennes et syro-phéniciennes. Des modèles de bateaux en plomb, prove-
nant d’une tombe de Naxos, nous donnent une image encore plus pré-
cise. Ces bateaux pouvaient également s’adonner à la piraterie sur les
côtes voisines ; c’est là pure hypothèse, mais qui ne semble pas invrai-
semblable si l’on se rappelle ce que dit Thucydide des coups portés aux
pirates cycladiques par la flotte de Minos - quoique cela se rapporte à
une époque postérieure. Ces embarcations devaient comporter quelque
armement mais il serait vain de chercher de véritables bateaux de
guerre.
A partir de l’organisation de la vie économique, nous pouvons for-
muler quelques conclusions d’ordre général sur la vie sociale au Cycladi-
que ancien. Très simple au début, elle est devenue complexe, surtout à
cause de la spécialisation artisanale. L’organisation en génos et familles
s’est affaiblie dans les Cyclades plus rapidement qu’en Crète. C’est du
moins ce qu’on déduit de l’organisation des groupes d’individus dans les
agglomérations, mais surtout de l’individualisation des tombes. On ne
trouve pas de tombes communes comme en Crète, même pas dans la
toute première phase. Une économie rurale pauvre ne conduisait pas à
la collaboration de groupes nombreux ni aux alliances familiales ; la
famille, même dans son acception la plus large, était en mesure
d’affronter les difficultés de la vie quotidienne ; le recours à la mer a
été source d’individualisme, aussi longtemps qu’on n’a pas essayé de
former de plus grandes entreprises de navigation ou de commerce. Les
grandes embarcations, toutefois, faisaient peut-être appel à la collabora-