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LE RAVISSEMENT DE TYLER MARSHALL
souvient d’une odeur plus terrible encore que celle qui règne ici, dans
cette cabane, une odeur venue du sud-ouest, d’un autre univers. Elle
appartenait au Pêcheur, elle aussi, ou à ce qu’est le Pêcheur dans cet
autre monde.
Lorsqu’il se tourne vers Dale, c’est l’ancien flic d’élite qui parle.
— Tu sais, je pense que tu devrais demander à Henry d’écouter
la cassette de l’appel au 911.
— Pardon ? Je ne te suis pas bien.
— Henry a une oreille comme personne. Même s’il ne reconnaît
pas formellement la voix, elle lui en apprendra cent fois plus que nous
n’en avons besoin.
— C’est vrai qu’il n’oublie jamais une voix, oncle Henry... Bon,
on se tire de là. L’équipe d’autopsie va arriver d’un moment à l’autre.
Alors qu’il traîne derrière les deux autres, Jack pense à la casquette
de Tyler Marshall. Il revoit l’endroit où il l’a trouvée, ce monde qu’il a
passé plus de la moitié de sa vie à nier, auquel il est revenu ce matin, un
retour dont il sent encore l’onde de choc. Le Pêcheur lui a laissé ce
couvre-chef dans les Territoires, cet espace dont il a entendu parler pour
la première fois quand il avait six ans, quand... papa jouait du sax. Elle
est à nouveau là, cette formidable aventure, non par sa volonté mais
parce qu’il en est ainsi, parce que des forces qui le dépassent l’ont
attrapé par la nuque et l’ont poussé en avant. En avant dans son passé !
Le Pêcheur est fier de son travail, oui. Il les provoque tous, mais son
défi s’adresse en fait à Jack Sawyer et à lui seul, car lui seul a connu les
Territoires. Et dans ce cas... Dans ce cas, les Territoires et tout ce qu’ils
recèlent ont à voir avec ces crimes monstrueux. Jack a été entraîné dans
un drame dont il ne peut encore mesurer les énormes conséquences. Le
message écrit de la main de sa mère est un élément du puzzle. Il en a la
conviction intime. Comme il a la conviction que Tyler Marshall est
toujours vivant, caché dans un coin de l’autre monde. Savoir qu’il ne
peut en parler à personne, pas même à Henry Leyden, rend sa solitude
encore plus intense.
Ses réflexions volent en éclats dans le chaos sonore qui vient de se
déclencher. On croirait une attaque d’indiens dans un western, avec
hululements et galops. Et il y a ces cris de femme qui rappellent
étonnamment le son des sirènes que Jack a entendu tout à l’heure sans y
prendre garde.
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