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BIENVENUE AU PAYS DES RAVINS
labeur surhumain donne la surprenante impression de se dissimuler,
oui, de vouloir échapper au regard, qui met un moment à la retrouver
après l’avoir perdue dans la masse de verdure. Nous sommes enclins à
penser à quelque mine secrète exploitée par des nains, au chemin d'un
dragon vers un trésor caché sous la protection d’un sort. Mais non, tout
cela est trop puéril. Et cependant, lorsque nous perdons de l’altitude
pour une inspection plus précise, nous apercevons une pancarte
vermoulue clouée au début de la piste : « Défense d’entrer », ce qui
prouve qu’il y a bien quelque chose à protéger, ne serait-ce qu’une
propriété privée.
Ce détail noté, nous observons l’autre extrémité de la piste. Dans
la pénombre du sous-bois, il y a une zone qui paraît plus dense et, même
si l’obscurité l’efface aussitôt, elle a révélé une solidité non naturelle qui
la distingue des arbres alentour. « Oh ! ah ! » pensons-nous comme en
écho aux élucubrations de Bumy, voyons voir un peu ce que nous avons
là ! Un mur ? Mais alors si imprécis, si informe... En arrivant au milieu
de la dernière boucle de la piste, nous remarquons, entre les
frondaisons, un triangle sombre qui se révèle soudain être un toit pentu.
Il faut l’approcher au plus près pour que l’ensemble de la construction
apparaisse : une maison en bois à deux étages, étrangement de guingois,
avec un porche d’entrée mal en point. Inhabitée depuis longtemps,
d’évidence, et, dans son excentricité, très hostile à l’idée de connaître de
nouveaux occupants : un deuxième panneau « Défense d’entrer » pend à
l’un des piliers, formant un angle invraisemblable. Il ne fait que
souligner l’impression générale.
Le toit à pentes ne couvre que la partie centrale. À gauche, une aile
à un étage se perd dans les bois tandis qu’à droite des extensions
s’élèvent tels des buissons démesurés, excroissances plutôt qu’ajouts
planifiés. Cette bâtisse paraît déséquilibrée, au double sens du terme.
C’est un cerveau malade qui l’a conçue, qui s’est ingénié à poursuivre
ce résultat incohérent, rétif à toute explication rationnelle. Malgré
l’usure du temps et du climat, ces briques et ces planches dégagent une
impression d’étrange invulnérabilité têtue, monolithique. La tranquillité,
voire l’isolement, a été à l’évidence recherchée et, cependant, la maison
semble toujours les réclamer.
Le détail bizarre entre tous que nous observons maintenant est
qu’elle est peinte en noir, entièrement, uniformément. Non seulement la
stmcture mais aussi chaque élément extérieur, jusqu’aux gouttières et
jusqu’aux vitres. Noire, noire de bas en haut. Et ça, c’est tout
simplement impossible : dans cette brave et naïve contrée
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