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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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106 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI<br />

Par ailleurs, le travail en commun est préféré au travail individuel, <strong>et</strong> son rendement est réputé<br />

supérieur l. La réunion d’un grand nombre de travailleurs donne habituellement lieu à une véritable<br />

fête. Le travail collectif ne se réduit pas, en eff<strong>et</strong>, à l’addition du travail des individus ; il est une activité<br />

originale, qualitativement différente du travail individuel. Son aspect pénible s’estompe: les invitations<br />

de culture sont souvent des fêtes bruyantes <strong>et</strong> joyeuses, où fusent les plaisanteries <strong>et</strong> où l’émulation<br />

réciproque des travailleurs crée un climat de fraternelle compétition. Parmi les jeunes, chacun<br />

désire avancer plus vite que son voisin. Si l’un d’eux, par excès de zèle, casse le manche de sa houe,<br />

tous l’acclament <strong>et</strong> lui présentent des vœux de prospérité. Lorsque, <strong>dans</strong> la hâte de cultiver, deux<br />

travailleurs entrechoquent leurs outils, c’est à qui réclamera le premier le don d’une femme - ce qui<br />

provoque une hilarité générale. Au moment où la saison agricole impose un labeur quotidien harassant<br />

tandis que la pitance est maigre, les cultivateurs sont heureux de se rendre à une invitation de culture<br />

pour rompre la monotonie de leur existence. Ces rendez-vous de travail sont des occasions d’échanges<br />

<strong>sociaux</strong> intenses, d’autant plus appréciés que les marchés sont peu fréquentés au cours de c<strong>et</strong>te<br />

saison.<br />

Les formes d’organisation du travail communautaire libre les plus importantes par leurs incidences<br />

sur les activités <strong>agricoles</strong> <strong>et</strong> par leurs répercussions sociales sont les rabense, les sosose, <strong>et</strong> les<br />

cultures de naam.<br />

A. - L’AIDE RÉCIPROQUE, RAPE&%E.<br />

1. Définition <strong>et</strong> évolution de c<strong>et</strong>te forme d’entraide.<br />

Les séances de culture rabense 2 groupent des personnes appartenant à des unités de production<br />

différentes, qui ont décidé de s’accorder une aide réciproque durant quelque temps. C<strong>et</strong>te forme<br />

traditionnelle de coopération peut être organisée entre deux ou plusieurs unités de production,<br />

chacune recevant à tour de rôle l’aide des membres actifs des unités associées. Il existe une forme<br />

particulière de ruben.se, les dukoup’rubense a, q ui associent pour l’entraide ,un nombre variable de<br />

célibataires. Les rubense sont toujours consacrés à la culture des champs communs de l’exploitation<br />

bénéficiaire, même lorsqu’ils sont organisés par des célibataires. Hommes <strong>et</strong> femmes, jeunes gens <strong>et</strong><br />

jeunes filles participent ensemble à ces séances de culture. Mais seuls les jeunes gens peuvent prendre<br />

l’initiative d’organiser des rubense de célibataires.<br />

Selon les hommes âgés, les rubense étaient autrefois pratiqués par la plupart des cultivateurs,<br />

notamment entre parents. Les raisons de c<strong>et</strong>te coopération étaient techniques, économiques <strong>et</strong><br />

sociales. Les liens entre les membres des groupes lignagers <strong>et</strong> des communautés locales étaient annuellement<br />

restaurés par c<strong>et</strong> échange de services, la prééminence des valeurs communautaires était réaffirmée,<br />

<strong>et</strong> en même temps l’entraide perm<strong>et</strong>tait d’élargir le goulot d’étranglement des travaux <strong>agricoles</strong>.<br />

De c<strong>et</strong>te façon l’hivernage était aussi un moment important de la vie sociale, malgré la priorité accordée<br />

aux impératifs économiques: les relations étaient concrètement mises à Vépreuve. C<strong>et</strong>te expérimentation<br />

des rapports <strong>sociaux</strong> s’effectuait en eff<strong>et</strong> à un niveau fondamental de la réalité : <strong>dans</strong> le domaine<br />

des activités destinées à assurer la subsistance. La coopération agricole, dont les rubense étaient la<br />

1. La préférence pour le travail communautaire est fréquente <strong>dans</strong> les sociétés <strong>agricoles</strong> africaines. Cf. par<br />

exemple, RAULIN, 1963a (p. 67).<br />

2. Le terme rabense n’existe en langue more que sous la forme du pluriel. Par souci de commodité, nous<br />

emploirons en français le singulier (un rabense) pour désigner une séance de culture de type rabense. L’usage du mot<br />

sans complément de nom désigne les rubense organisés entre unités de production: quand il s’agit de rabense de cklibataires,<br />

cela est précisé.<br />

3. Dakoap’, de dakoore (pl. dakoaapu): célibataire, veuf.

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