Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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ANNEXES 177 quelques mois avant le mariage, a lieu le teto l: le fiancé offre un bouc, de la boisson et de la nourriture aux aînés du lignage de ses futurs beaux-parents. Le sato 2 est l’ultime démarche faite par le fiancé avant qu’il n’envoie ses frères et ses camarades chercher la promise : de la bière de mil et des poulets sont offerts à cette Occasion comme précédemment. Enfin, c’est le nyokre 3: ceux qui viennent chercher la jeune femme pour le mariage sacrifient un poulet devant la case de sa mère 4. Les cadeaux offerts lors des différentes phases qui séparent une promesse de mariage de son accomplissement varient en nature et en importance, selon le statut social et les capacités économiques des personnes concernées. Ils comprennent toujours de la bière de mil, de la volaille - coqs, poulets ou pintades -, et du petit bétail - chèvres pour les gens du commun, moutons pour les lignages des chefs. Assez souvent, de modestes sommes d’argent entrent dans la composition de ces’ cadeaux - quelques centaines de francs, mille ou deux mille francs dans des cas exceptionnels 5. En plus des cadeaux offerts lors des phases du reemdo citées plus haut, chaque fiancé se rend chez ses futurs beaux-parents à l’occasion des fêtes et leur apporte des présents, notamment aux funérailles solennelles. Enfin, tout jeune homme fiancé qui voit approcher le moment du mariage se rend, un jour par an, chez son beau-père pour l’aider à cultiver; il y emmène ses frères et ses camarades 6. Quand le fiancé est un homme déjà marié et âgé, il envoie chez son nouveau beau-père ses frères plus jeunes ou ses enfants. Cette pratique est plus importante par ses implications sociales que par ses conséquences économiques : elle doit surtout renforcer les liens d’alliance par une forme d’aide qui fait plaisir et honneur à qui la reçoit. En contrepartie, le bénéficiaire du travail offre de la boisson et de la nourriture à son futur gendre et à ses compagnons, qu’il considère comme ses invités. Ce service n’est pas une prestation économique, il s’inscrit dans le cadre ordinaire des relations entre lignages alliés. Les hommes mariés continuent à pratiquer cette forme d’entraide agricole avec leurs beauxparents. En cas d’annulation de la promesse de mariage ou de rupture d’un mariage consommé, les cadeaux. remdo ne sont normalement pas restitués - même si la cause de la rupture est imputable à la femme ou à sa famille. Les cadeaux ne sont pas une compensation matrimoniale, quelle que soit leur valeur. Ce sont des biens de consommation offerts gracieusement aux aînés du lignage allié, pour renforcer les liens sociaux. Les mêmes cadeaux vont aux chefs ou aux aînés de lignage en-dehors de toute affaire matrimoniale, pour appuyer une quelconque demande. Depuis que l’argent entre dans la composition des cadeaux remdo et que le fiancé peut être obligé par ses futurs beaux-parents à acquitter pendant plusieurs années l’impôt de celle qui lui est promise, la restitution de ces cadeaux et des sommes versées au fisc est parfois exigée en cas de rupture de l’alliance, et il arrive que l’individu lésé fasse appel à l’administration pour obtenir gain de cause. Si la responsabilité de la rupture est imputable aux beaux-parents, ils peuvent être contraints à rendre les cadeaux et à rembourser le montant des impôts payés par le fiancé; si les torts sont imputés à la femme, la restitution est à la charge de son nouveau mari. De cette façon, le remdo traditionnel est dénaturé, et les salutations coutumières tendent à se muer en marchandages. 1. Teto, de take: tirer à soi. Par les salutations et les cadeaux du teto, le fiancé indique qu’il estime le moment venu de prendre sa future femme. 2. Sato, de su: finir. 3. Nyokre, de nyoke: prendre. 4. Dans certaines régions, les cadeaux offerts à la belle-mère comportaient autrefois des cauris. Cf. Coutumes messies..., 1933 (p. 37): (( Indépendamment de ces cadeaux, on remet pour la belle-mère dans un sac cousu, 444 ou 1 400 cauris (prix de la virginité). La mère donne ces cauris à ses co-épouses [. . .] ; il est défendu à la jeune fille de voir ce sac, à plus forte raison de manger quoique ce soit acheté avec ces cauris. 1) 5. On lir dans Coutumes messies.. . 1933, (An. p. XJ) qu’
178 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI Exemple de « remdo ». En 1958, une fillette nommee Timisi, âgée de sept ans, a été promise en mariage par le doyen du lignage Sawadogo de Piolla à Zongo Tampouré, né en 1938 à Dakola et habitant cette localité. Cette promesse a été obtenue par l’intermédiaire de OuCdraogo Ouamnouaga de Dakola, neveu utérin des parents de Timisi et ami de Tampouré. Entre 1958 et 1968, année de la consommation du mariage, Zongo Tampouré a offert à la famille de sa fiancée, les cadeaux suivants: Valeur approximatiwe Sosga 2 canaris de bière 200 F CFA 2 coqs 300 F CFA Tom-yugri 4 canaris de bière 1 coq 400 F CFA 150 F CFA Korgo-bumbu 6 pintades 600.F CFA Mwembo Pelebsego Teto 1 chèvre gâteau de mil 1 chèvre gâteau de mil 2 canaris de bière une somme d’argent 1 bouc 1 panier de farine de mil 1 barre de sel condiments 1000 F CFA 200 F CFA 1000 F CFA 200 F CFA 200 F CFA (montant non précisé) 350 F CFA 100 F CFA 200 F CFA 125 F CFA Sut0 2 poulets 200 F CFA Nyokre 1 poulet 1 pintade 100 F CFA 100 F CFA En outre, Zongo Tampouré a donné chaque année un poulet à ses beaux-parents, à l’occasion de la fête des masques ; il leur a également offert six canaris de bière, deux chèvres, des poulets et de menues sommes d’argent lors de funérailles. On peut estimer à près de 10 000 francs CFA l’ensemble des cadeaux que Zongo Tampouré a adressés à la famille de sa future épouse au cours des dix ans qui ont séparé la promesse de mariage du mariage. Quelques mois après que Timisi eut rejoint son mari, elle s’évada pour rejoindre un amant qui l’a sans doute emmenée en Côte d’ivoire; on a perdu leur trace. Zongo Tampouré a porté plainte au cercle. S’il ne parvient pas à récupérer son épouse, il tentera d’obtenir la restitution en espèces des cadeaux qu’il a faits à ses beaux-parents et de l’impôt qu’il a payé pour sa femme.
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