Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

172 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI
les structures traditionnelles et les structures modernes. La puissance des détenteurs du pouvoir
coutumier demeure ; et pour le moment, les nouvelles élites ne se posent qu’en s’opposant aux autorités
traditionnelles. Elles n’ont pas encore acquis une force politique autonome, leur permettant
d’agir efficacement de leur propre vouloir et avec des moyens propres. D’une certaine façon, ces
élites tirent leur autorité du combat qu’elles mènent contre les anciens détenteurs du pouvoir, et leur
existence politique ne s’affirme et ne se développe en réalité qu’en fonction du pouvoir traditionnel.
Leur position est par conséquent inconfortable et place dans l’embarras ceux qui les suivent. C’est
pourquoi l’influence de ces élites ne pourra efficacement déboucher sur le plan social et économique
que lorsque sera résolue la contradiction fondamentale de leur position actuelle dans le système
d’autorité mossi.
L’influence des jeunes hommes qui ont voyagé et loué leur force de travail à l’étranger est
d’une certaine façon plus immédiate et plus efficace que l’influence des élites. Ces hommes reviennent
chez eux avec des besoins nouveaux; ils désirent disposer d’argent pour parader et consolider leur
indépendance conquise à l’étranger, et pour se procurer des biens de consommation importés. Ils
sont donc amenés à produire plus que ce qu’exige la subsistance, afin de pouvoir commercialiser
une partie de leurs récoltes. Ainsi la production de coton se dégagera peu à peu, au cours des années
à venir, des déterminations de l’économie traditionnelle et amorcera une agriculture commerciale.
En somme, les activités agricoles dans la région de Dakola demeurent globalement sous
l’influence prépondérante des valeurs et des structures d’un univers traditionnel en décomposition,
qui n’a jamais accordé à l’agriculture une valeur primordiale. Il est possible de deviner les amorces
d’une restructuration sociale et économique qui changera le statut de cette agriculture. Mais les
contradictions non résolues de la situation politique freinent les processus de la transformation
socio-économique.
L’étude du système de production et du régime foncier à Dakola n’autorise pas de conclusions
valables pour l’ensemble du Mossi, mais elle permet de poser plus clairement quelques-uns des problèmes
concernant le développement de ce pays ; et elle montre comment ces problèmes sont en voie
d’être résolus dans les localités situées entre les collines birrimiennes de l’Ouest. Le système agricole
est peu évolué, mais il est doué à l’heure actuelle d’une assez remarquable capacité d’adaptation.
Grâce à une conjoncture socio-économique favorable, les entreprises novatrices des individus et des
groupes marginaux semblent maintenant assurées d’une diffusion relativement rapide. Un nombre
croissant de cultivateurs demande l’assistance technique des organismes de vulgarisation et souhaite
pouvoir compter sur une politique efficace de crédit agricole. Et parce que sa valeur économique
augmente chaque jour, la terre sera de plus en plus souvent cultivée de façon intensive, avec le souci
de la conservation et même de l’amélioration de ce capital. Ce développement, qui enrichit le pays,
détruit les formes égalitaires qui caractérisaient la vie de cette société en économie de subsistance l;
il provoque des inégalités sociales et économiques qui se traduiront sans doute à moyen terme par
un accroissement de l’exode rural et par la naissance d’une classe d’exploitants privilégiés.
1. L’apparition de diverses formes de faire-valoir indirect, en particulier l’&ploitation de bas-fonds aménagés
au profit de fonctionnaires résidant en ville, constitue un signe certain de cette évolution.