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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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146 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI<br />

Sur le plan religieux, c<strong>et</strong> ordre nouveau devait être géré par ceux qui commandaient le pays ou tout<br />

au moins sous leur surveillance immediate, c’est-à-dire par des personnes nommées ou confirmées<br />

<strong>dans</strong> ces fonctions par les chefs. Le rôle d’intercesseurs auprès de la terre de leurs ancêtres ne fut<br />

normalement conservé par les Ninisi que pour les portions du territoire restées sous leur dépendance<br />

du fait d’un contrôle politique.<br />

S’il arrive, comme à Pilimpikou, que les descendants des premiers occupants reviennent<br />

périodiquement de loin sur la terre de leurs ancêtres pour y effectuer des sacrifices, leur pratique est<br />

considérée comme étrangère à l’ordre religieux mossi. Les nouveaux occupants des terres n’accordent<br />

guère d’attention à ces rituels, dont ils n’attendent pour eux-mêmes aucun eff<strong>et</strong> bénéfique. Le maître<br />

de la terre de Pilimpikou, conscient d’être l’unique prêtre autorisé de la terre de c<strong>et</strong>te localité, est<br />

opposé à ces pratiques : CC S’il nous arrivait de surprendre des étrangers en train de sacrifier sur notrë<br />

terre, nous les chasserions aussitôt: agir comme eux, c’est comm<strong>et</strong>tre un vol ! »<br />

Quand les chefs mossi de Samba ou de Dakola demandent aux Ninisi d’intervenir auprès de<br />

la terre <strong>et</strong> de leurs ancêtres afin de solliciter fécondité <strong>et</strong> fertilité pour l’ensemble du commandement,<br />

c<strong>et</strong>te démarche est analogue à celles effectuées par ces chefs auprès des Nyonyose de Pilimpikou ou<br />

des Yarse de Somyaléguèm (tous installés <strong>dans</strong> la région après l’arrivée de naaba Tengzondé), ou<br />

encore auprès d’un quelconque personnage réputé puissant <strong>dans</strong> l’ordre religieux (quel que soit son<br />

rapport personnel avec la terre). Dans ces commandements régionaux, les Ninisi ne contrôlent<br />

efficacement aucun domaine religieux réservé, les <strong>Mossi</strong> ne se trouvent jamais par rapport à eux en<br />

situation de dépendance stricte l. Ces observations ne concordent pas avec les conclusions trop<br />

catégoriques de TAUXIER sur la séparation des pouvoirs politiques <strong>et</strong> des pouvoirs religieux relatifs<br />

au culte de la terre:<br />

« Quand les <strong>Mossi</strong> envahirent <strong>et</strong> conquirent le pays, ils mirent, au fur <strong>et</strong> à mesure de la conquête, à la tête de<br />

tous les villages <strong>et</strong> de tous les cantons, des hommes de leur race, pour s’assurer la soumission de la population vaincue,<br />

mais ils ne pensèrent jamais [...] qu’ils fussent qualifiés pour offrir des sacrifices à la terre de l’endroit <strong>et</strong> aux divinités<br />

du lieu » a.<br />

De telles affirmations ont été souvent reprises <strong>et</strong> ont conduit divers auteurs à des conceptions<br />

schématiques <strong>et</strong> fausses concernant l’organisation politico-religieuse des <strong>Mossi</strong>. Dans maints endroits,<br />

en fait, les envahisseurs mossi ont laissé une part du pouvoir politique aux mains des anciens occupants<br />

de la terre; <strong>et</strong> souvent, ils ont imposé un nouveau culte de la terre, célébré par des prêtres venus avec<br />

eux ou même par des <strong>Mossi</strong> du commun nommés par eux aux charges rituelles.<br />

Les enquêtes menées à Samba, Dakola <strong>et</strong> Batono montrent que, <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te région, le rôle de<br />

maître de la terre ne revenait pas systématiquement à un groupe socio-<strong>et</strong>hnique spécialisé 3. Par<br />

ailleurs, l’origine soc&-<strong>et</strong>hnique diverse des maîtres de la terre <strong>et</strong> le caractère vague <strong>et</strong> fluctuant des<br />

relations hiérarchiques qui les unissent excluent pour c<strong>et</strong>te région l’hypothèse selon laquelle leur<br />

organisation constituerait les « vestiges d’un pouvoir politico-religieux centralisé qui aurait dominé<br />

le pays avant la conquête Dagomba, ou même, la réplique du pouvoir centralisé des Nabas (gens du<br />

soleil) mais concernant les Nioniosés (gens de la terre) » 4. Les Ninisi du quartier Tolo de Samba,<br />

,<br />

1. SKINNER, 1964a (p. 134), expose un point de vue semblable: K The Mo& chiefs insisted on the primacy of<br />

the nam over any other power. They employed the tengsoba-damba to intercede with tenga for the welfare of their<br />

subjects, but they never allowed the priests to control them [...]. In fact, the <strong>Mossi</strong> rulers later used Islam and its<br />

adherents in the same mariner as they had used the aboriginal religion. »<br />

aBORE, 1966 (p. 113), fait également remarquer que « si le naaba ne peut sacrifier, il ne faut pas perdre de vue<br />

que le tingsoba ne peut entreprendre de sacrifices sans son autorisation. ))<br />

2. TAUXIER, 1912 (pp. 594-595).<br />

3. Pour les commandements régionaux de Samba, Dakola <strong>et</strong> Batono, on ne r<strong>et</strong>iendra pas les conclusions<br />

suivantes présentées par BOUTILLIER, 1964 (p. 41) : « Tous les chefs de terre font partie du clan Nioniosé des Sawadogo<br />

<strong>et</strong>, au fur <strong>et</strong> à mesure de l’expansion mossi causée par les conquêtes, l’expansion démographique <strong>et</strong> la recherche de<br />

nouveaux terrains de culture, aussitôt qu’un groupe de quelque importance s’installait <strong>dans</strong> une zone préalablement vide<br />

de toute occupation humaine, soit un Sawadogo faisant partie du groupe migrant revenait <strong>dans</strong> son village originel se<br />

faire investir de la dignité de tenga-soba, soit le village le plus proche du nouveau village envoyait un Sawadogo qui,<br />

grâce à une délégation du pouvoir devenait tenga-soba à son tour. »<br />

4. BOUTILLIER, 1964 (p. 41). L’auteur de la seconde hypothèse, cité par BOUTILLIER, est ZAHAN (1961).

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