Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

FORMES PARTICULIÈRES D’ORGANISATION DU TRAVAIL 115
La dépense monétaire fut de 170 francs CFA; l’exploitant a prélevé dans son grenier du sorgho
pour la préparation du gâteau.
Dans le cadre de l’entraide réalisée entre ces cinq cultivateurs, il y eut échange de huit journées
de travail, ce qui représente en tout seize journées de main-d’oeuvre étrangère aux cinq exploitations
bénéficiaires. Ces seize journées furent fournies à l’occasion de huit séances de culture. Les dépenses
en numéraire effectuées lors de ces séances s’élevèrent à 855 francs CFA; le prix du mil fourni par
les exploitants pour la préparation du gâteau doit être compté en plus. Si on fait la somme des journées
de travail fournies lors des huit séances de culture par les membres actifs des exploitations bénéficiaires
et par la main-d’œuvre étrangère à ces exploitations, on obtient un total de trente-sept.
Cet exemple de rabense illustre bien la pratique actuellement courante: les journées de travail
sont comptabilisées avec précision et échangées unité pour unité. Les journées de travail d’homme
ne peuvent pas être rendues par des journées de travail de femme. Ces rabense coûtent relativement
cher: la nourriture quotidienne est amgliorée par le poisson sec, on achète tabac et noix de kola, et
on consomme parfois de la bière de mil.
B. - LES INVITATIONS DE CULTURE, SOSOSE.
1. Définition et évolution de cette forme de coopération.
Le sosouga (pl. sosose) est une forme traditionnelle de coopération pour les travaux agricoles,
qui groupe un nombre variable de travailleurs volontaires pour une séance de culture d’une demijournée
ou d.‘un jour entier, sur le champ de l’exploitant qui fait le sosoaga. Les cultivateurs qui se
rendent à cette sorte d’invitation de culture ne sont jamais rémunérés, mais le bénéficiaire du sosougu
leur fournit nourriture et boisson; et jadis, il s’engageait moralement à se rendre aux sosose organisés
par ceux qui étaient venus travailler sur son champ.
Tandis que les rubense s’effectuent selon un principe de réciprocité stricte, les sosose constituent
un mode de coopération à la fois plus large et plus souple. Comme les marchés sont peu animés au
cours de l’hivernage et que cette saison ne comprend pas de fêtes politiques ou religieuses, certains
sosose constituent les plus importants rassemblements de population durant les mois consacrés au
travail agricole. Ils fournissent aux individus la possibilité de mesurer et de manifester leur influence
sociale et leur puissance économique. Les rabense ne concernent que de petits groupes désireux de
se lier entre eux ou de profiter de leurs capacités de travail conjugués. Mais les sosose s’adressent à des
communautés étendues - quartiers, par exemple -, ils impliquent par conséquent une plus grande
richesse de relations sociales.
Parce que le sosouga est un mode de coopération moins rigide que le dense, plus sensible à
une grande variété de facteurs psychologiques et sociologiques, et moins directement déterminé par
le facteur travail, le sosoagu traditionnel a subi des transformations importantes sous l’infhrence de
l’évolution politique et économique depuis la colonisation.
Autrefois, le sosouga était essentiellement une forme d’entraider. Chaque chef d’exploitation
y conviait ses parents, voisins, amis ou dépendants qui désiraient ou devaient lui fournir une aide.
1. ((Le caractère d’entraide que l’invitation de culture présentait jusqu’à maintenant était lié à la nécessité
absolue de réussir les cultures de subsistance 11, Société d’tiide Technique et de Coopération, 1964 (p. 32). -