26.12.2013 Views

Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

108 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI<br />

forme la plus habituelle, apparaissait comme une nécessité pour la survie biologique <strong>et</strong> sociale des<br />

communautés. Les intérêts individuels apparaissaient secondaires <strong>et</strong> aucun groupe ne pouvait se<br />

contenter de se préoccuper seulement de sa propre subsistance. Dans ce contexte, le travail n’était<br />

pas comptabilisé, il n’était pas marchandé, car la survie communautaire ne pouvait en aucune façon<br />

résulter d’un marchandage entre individus ou groupes isolés. L’exigence de réciprocité était certes<br />

inhérente à la coopération, mais la réciprocité n’était pas comptabilisée en journées de travail, elle<br />

s’actualisait <strong>dans</strong> les divers domaines de la vie économique <strong>et</strong> sociale. Pour organiser des rubense, il<br />

n’était pas indispensable, autrefois, que deux familles disposent exactement du même nombre de<br />

travailleurs ; c’egt leur volonté de se fournir une aide mutuelle <strong>et</strong> de renforcer leurs liens <strong>sociaux</strong> qui<br />

était primordiale.<br />

L’évolution générale de la société a entraîné assez récemment une forte diminution de la<br />

fréquence des rubense <strong>et</strong> une progressive transformation de c<strong>et</strong>te sorte de coopération. Depuis l’époque<br />

coloniale jusqu’à nos jours, les formes de la solidarité traditionnelle se sont lentement dégradées<br />

tandis que s’affaiblissaient les principes d’autorité qui assuraient autrefois la cohésion de c<strong>et</strong>te société.<br />

Les grandes unités sociales ont éclaté, <strong>et</strong> les unités restreintes se sont repliées sur elles-mêmes, faisant<br />

l’inventaire de leurs propres moyens de production pour tenter de les exploiter au mieux de façon<br />

autonome.<br />

A l’heure actuelle, de nombreux chefs d’exploitation n’organisent plus de rubense. Et pour ceux<br />

qui ont conservé l’habitude de pratiquer c<strong>et</strong>te forme d’entraide, le nombre annuel de ces séances<br />

de culture a beaucoup diminué. Les journées de travail sont désormais comptabilisées. Un chef<br />

d’exploitation n’accepte de faire des rubense qu’avec un partenaire disposant d’un volume de maind’œuvre<br />

à peu près identique au sien, ou bien il n’engage pour les séances de culture qu’une partie<br />

de la maind’œuvre qu’il contrôle. En même temps, le coût des rubense a augmenté, car l’exploitant<br />

bénéficiaire doit de plus en plus souvent fournir des produits de consommation qui ne sont pas d’un<br />

usage quotidien (poisson <strong>et</strong> parfois bière de mil).<br />

Le recours à l’entraide traditionnelle pour les cultures de rapport posera à brève échéance de<br />

graves problèmes. Les cultivateurs n’ont qu’une conscience vague des implications de la situation<br />

actuelle ; mais déjà ils réagissent parfois par la réserve <strong>et</strong> le repli. Les rubense ont été jusqu’à présent<br />

une entraide caractérisée par les conditions générales d’une économie de subsistance: priorité des<br />

relations interpersonnelles, absence de concurrence économique, régulation de la compétition<br />

sociale, aspects communautaires du problème de la survie. Mais l’économie de marché introduite<br />

par la production du coton ouvre théoriquement la possibilité de l’enrichissement individuel des<br />

cultivateurs, indépendamment de la communauté. Et l’idée de la convertibilité de la puissance<br />

économique en puissance sociale commence à se répandre, en particulier chez les jeunes cultivateurs<br />

qui ont travaillé en Côte d’ivoire. C’est certainement l’une des raisons du climat de suspicion qui<br />

s’est substitué au climat de coopération. Chaque unité de production surveille l’unité voisine avec la<br />

crainte qu’elle ne développe une puissance économique qui pourrait se transformer en domination.<br />

2. L’aide réciproque à Dakola.<br />

a) FRÉQUENCE DES rubense.<br />

Près de la moitié des exploitants n’ont pas organisé de rubense en 1964. Mais ces cultivateurs<br />

prétendent regr<strong>et</strong>ter de ne pas avoir pu recourir à c<strong>et</strong>te forme de coopération, <strong>et</strong> ils évoquent avec<br />

nostalgie ce qu’ils ont appris de l’entraide des temps passés. Les valeurs communautaires demeurent<br />

présentes <strong>dans</strong> les esprits, même si <strong>dans</strong> la réalité elles sont de moins en moins appliquées. Pour<br />

expliquer la situation actuelle, les cultivateurs incriminent les ambitions individuelles de certains,<br />

ils font allusion à une mésentente générale, <strong>et</strong> souvent ils constatent qu’ils n’entr<strong>et</strong>iennent pas de

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!