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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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ANNEXES 221<br />

familial ne perm<strong>et</strong> pas aux jeunes de réussir selon les normes nouvelles qui s’imposent à eux, car les<br />

valeurs attachées au succès individuel ont supplanté celles relatives à l’intégration communautaire.<br />

Autrefois, chaque célibataire pouvait espérer recevoir sa première épouse par l’intermédiaire de ses<br />

aînés, après avoir travaillé longtemps <strong>dans</strong> l’unité de production familiale, Mais à moins de s’être<br />

résigné à une longue patience, le célibataire préfère maintenant vivre sa vie loin de ses aînés, <strong>et</strong><br />

nombreux sont ceux qui enlèvent des femmes grâce à leurs propres ressources. Les formes traditionnelles<br />

de solidarité se dégradent en même temps que l’éloignement de leurs membres disloque les<br />

communautés locales, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te évolution est aggravée par le caractère individuel des risques que<br />

prennent les migrants en quittant leur famille à l’insu des aînés. L’argent qu’ils rapportent leur confère<br />

une puissance indépendante de leur statut personnel <strong>dans</strong> l’organisation sociale traditionnelle l.<br />

Le développement des phénomènes migratoires peut être présenté comme une conséquence<br />

des transformations survenues <strong>dans</strong> les conditions traditionnelles de la vie économique, sociale <strong>et</strong><br />

culturelle. Mais devenues une nécessité économique après avoir été directement ou indirectement<br />

imposées par un pouvoir extérieur, les migrations ont été peu à peu investies de fonctions multiples<br />

sur le plan social <strong>et</strong> culturel. Elles sont donc aussi l’un des principaux moteurs des <strong>changements</strong> 2.<br />

Il serait vain de tenter d’apprécier séparément les facteurs sociologiques <strong>et</strong> les facteurs économiques<br />

qui déterminent les migrations, puisqu’ils sont en permanence interférents. R. DENIEL<br />

(1967, pp. 65.66) écrit à ce propos:<br />

K On est tenté d’attribuer les départs à des motifs essentiellement économiques. On peut au contraire être<br />

sensible à la densité de la vie sociale villageoise <strong>et</strong> à la subtilité des courants qui la traversent. On estimera alors que la<br />

migration est au service des relations humaines <strong>et</strong> que la quête des biens matériels n’est que le moyen d’accéder à un<br />

statut social stable <strong>et</strong> de haut niveau [. . .]. La pression sociale se fait sentir au maximum lors du premier départ, [tandis<br />

que] la pression économique est plus n<strong>et</strong>te lors des départs postérieurs, surtout s’il s’agit d’hommes mariés, plus encore<br />

si ces hommes sont des chefs de famille. )><br />

Le prestige de ceux qui réussissent en Côte d’ivoire s’appuie sur l’argent <strong>et</strong> les marchandises<br />

qu’ils rapportent. Ces biens sont surtout recherchés par les migrants en vue d’être investis <strong>dans</strong> la<br />

sphère sociologique - soit en étant redistribués en fonction de stratégies traditionnelles ou modernes,<br />

soit en étant simplement exhibés. L’univers défini par les limites étroites de l’économie de subsistance<br />

est socialement dévalorisé <strong>dans</strong> la mesure où il ne perm<strong>et</strong> pas d’accéder aux richesses - monnaie<br />

<strong>et</strong> marchandises d’importation - qui sont actuellement chargées d’une efficacité croissante <strong>dans</strong> les<br />

relàtions entre les hommes 3. Les migrations constituent pour le moment la principale <strong>et</strong> quasi unique<br />

voie d’accès à ces biens qui renflouent les circuits traditionnels de biens <strong>et</strong> de services en même temps<br />

qu’ils instaurent des circuits nouveaux caractérisés par l’utilisation objective de la puissance économique.<br />

Les jeunes partent pour acquérir les richesses qui leur assurent la considération sociale, mais<br />

leur départ est sans doute nécessaire pour assurer le dépassement de l’univers économique traditionnel<br />

- du moins en l’absence d’une politique efficace de développement.<br />

e) BILAN ÉCONOMIQUE.<br />

Il est difficile d’obtenir des informations valables sur les sommes d’argent envoyées par les<br />

migrants à leurs parents <strong>et</strong> sur celles rapportées par eux au terme de leurs séjours en Côte d’ivoire.<br />

Tandis que les parents restés au pays ont tendance à minimiser l’aide qui leur est fournie par les<br />

migrants, ceux-ci tentent parfois d’accroître leur prestige en exagérant l’importance des épargnes qu’ils<br />

rapportent. Quoiqu’il en soit, les informations recueillies à Dakola n’ont pas de valeur générale, car<br />

l’enquête était trop limitée ; elles ne serviront que d’illustration.<br />

Dans l’ensemble, les relations entre les migrants <strong>et</strong> leurs parents restés à Dakola sont assez<br />

régulières malgré la distance <strong>et</strong> les difficultés de communication. Les nouvelles sont échangées soit<br />

1. En 1960, SKINNER, 1960 (p. 283), pouvait écrire:

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