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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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208 ACTIVITÉS AGRICOLES ET CHANGEMENTS SOCIAUX DANS L’OUEST-MOSSI<br />

immédiate un comportement généralisé. de désobéissance aux ordres administratifs transmis par les<br />

chefs <strong>et</strong> un r<strong>et</strong>our à la situation prédcoloniale <strong>dans</strong> plusieurs domaines où le pouvoir avait apparemment<br />

réussi à imposer des innovations. Ainsi, les habitants des « villages de regroupement » construits le<br />

long des pistes s’étaient empressés de r<strong>et</strong>ourner <strong>dans</strong> les localités abandonnées pour y reconstruire<br />

leurs anciennes demeures ; les travaux avaient cessé <strong>dans</strong> les K villages de regroupement » en cours de<br />

construction, <strong>et</strong> aucun nouveau chantier n’avait été ouvert malgré les injonctions de l’administration.<br />

Quant aux Nakomse qui avaient été rassemblés <strong>dans</strong> un quartier de Yako pour pouvoir y être surveillés<br />

plus facilement, ils s’étaient également enfuis, rejoignant des localités éloignées du chef-lieu ou<br />

quittant le cercle.<br />

Le l<strong>et</strong>our de l’autorité coloniale était généralement d’autant plus brutal que son r<strong>et</strong>rait avait<br />

été plus profondément ressenti comme une libération <strong>et</strong> davantage mis à profit par les populations.<br />

En 1925, les Nakomse qui s’étaient sauvés de Yako ont été recherchés, ramenés au chef-lieu de la<br />

subdivision <strong>et</strong> emprisonnés durant quinze jours. Par l’intermédiaire des chefs, il devait être porté<br />

à la connaissance de tous les habitants de la subdivision que quiconque donnerait asile à un Nakomse<br />

en fuite serait sévèrement puni. Du reste, le chef de subdivision avait reçu de son supérieur hiérarchique<br />

des ordres précis à ce suj<strong>et</strong>:<br />

« II est absolument indispensable de reprendre en main les indigènes; c<strong>et</strong>te effervescence, c<strong>et</strong> esprit d’indépendance<br />

voulant se soustraire à toute autorité doivent cesser. Les mesures de clémence interviendront par la suite,<br />

s’il y a lieu »i.<br />

En 1939, un chef de subdivision signale que la circonscription se trouve <strong>dans</strong> une situation<br />

critique, imputable à une « organisation lamentable [. . .] qui ne fait pas honneur à l’administration<br />

[. ..], à l’absence de programme défini <strong>et</strong> au manque d’esprit de continuité <strong>dans</strong> la politique intéressant<br />

la production <strong>et</strong> ses débouchés )) z. De 192.5 à 1939, la subdivision a été fermée dix fois, soit durant<br />

à peu près six ans. Entre 1933 <strong>et</strong> 1939, on relève quatre ferm<strong>et</strong>ures totalisant trente-neuf mois. De<br />

1943 à 1947, la subdivision resta de nouveau sans titulaire 3. En somme, pendant une longue période,<br />

la subdivision n’a été administrée que la moitié du temps. En outre, les chefs de subdivision ont souvent<br />

manqué des moyens en hommes, en argent <strong>et</strong> en matériel qui eussent été nécessaires à la bonne<br />

exécution de leur tâche. C<strong>et</strong>te inconstance du pouvoir <strong>et</strong> sa médiocrité matérielle ont entraîné une<br />

détérioration profonde <strong>et</strong> durable de l’ensemble des structures politiques <strong>et</strong> économiques de c<strong>et</strong>te<br />

société.<br />

11 peut paraître surprenant que la vacance du pouvoir colonial ait eu pour conséquence une<br />

situation d’anarchie <strong>dans</strong> une région du pays mossi, <strong>et</strong> on pourrait être tenté de croire qu’il ne s’agissait<br />

<strong>dans</strong> le rapport cité plus haut que d’un qualificatif hyperbolique sous la plume d’un administrateur<br />

pessimiste. Toutefois, il est exact - d’autres informations écrites <strong>et</strong> orales le confirment - que les<br />

variations de l’autorité administrative ont entraîné maintes fois <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te région une situation proche<br />

de.l’anarchie. Par l’exercice de leur pouvoir de coercition, les chefs avaient dénaturé les liens qui les<br />

unissaient antérieurement à leurs suj<strong>et</strong>s ; mais pour l’exercice de ce pouvoir, ils étaient entièrement<br />

dépendants de l’autorité coloniale. Toute vacance du pouvoir colonial privait les chefs de leur puissance<br />

nouvelle, sans les replacer <strong>dans</strong> leur situation d’autorité traditionnelle: la possibilité de<br />

gouverner leur échappait dès que se r<strong>et</strong>irait la puissance étrangère qui les soutenait - du moins ne<br />

leur était-il pas possible de reprendre en main du jour au lendemain une situation qu’ils ne contrôlaient<br />

plus par leur propre autorité. L’ambiguïté <strong>et</strong> les variations de l’autorité ont eu pour autre<br />

conséquence un désarroi social, qui a engendré un sentiment d’jnsécurité généralisé <strong>et</strong> provoqué<br />

un repli sur elles-mêmes des p<strong>et</strong>ites unités sociales. Dans ce contexte, la suspicion devait remplacer<br />

l’esprit communautaire.<br />

Arch.,<br />

1. Bull<strong>et</strong>in mensuel, Subdivision de Yako, juin 1925, ms., Arch., Abidjan (sans numéro).<br />

2. Considérations générales sur le développement économique de la subdivision, premier semestre 1939, ms.,<br />

Yako.<br />

3. Rapport économique 1947, Subdivision de Yako, ms., Arch., Yako.

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