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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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CONCLUSION 171<br />

société accordant une grande importance aux rapports de force, un repli farouche sur les valeurs<br />

traditionnelles <strong>et</strong> une aliénation profonde sous l’influence puissante de déterminations étrangères.<br />

L’analyse de la situation politique <strong>et</strong> économique de la société de Dakola conduit à conclure<br />

que, <strong>dans</strong> les conditions actuelles, c<strong>et</strong>te société semble avoir épuisé la plupart des ressources de son<br />

équipement sociologique traditionnel. Les tensions <strong>et</strong> les conflits qui entr<strong>et</strong>iennent un climat social<br />

de suspicion permanente en fournissent une preuve. Reste à définir à partir de quel embryon social<br />

<strong>et</strong> selon quelles modalités s’effectuera la restructuration de c<strong>et</strong>te société.<br />

Les séquelles du passé font peser sur la situation présente une hypothèque qui ne saurait être<br />

levée par des discours, qu’il s’agisse de discours politiques ou techniques. La vulgarisation agricole<br />

« de masse N <strong>et</strong> les diverses formes d’assistance à la production ne peuvent pas créer par elles-mêmes<br />

un mouvement d’évolution. Quelle que soit leur cohérence interne <strong>et</strong> leur ton impératif, les discours<br />

des agents de développement n’ont pas directement prise sur la réalité sociale <strong>et</strong> économique ; de<br />

nombreux échecs en témoignent depuis l’époque coloniale jusqu’à nos jours. C’est que les démonstrations<br />

<strong>et</strong> modèles de ces agents sont le plus souvent extérieurs à l’ordre traditionnel <strong>et</strong> en vive concure<br />

rente avec lui. L’inertie des agriculteurs ou leur opposition se fonde sur la conscience qu’ils ont de<br />

l’enjeu de leurs relations avec les promoteurs du progrès: les valeurs fondamentales de leur société<br />

sont mises en question. Cependant, ce n’est pas d’abord la (( mentalité du milieu » qui peut <strong>et</strong> doit<br />

être changée. Du reste, le recours à la notion vague de mentalité recouvre des préjugés d’ordre moral,<br />

mais n’exprime pas une analyse rigoureuse. II est exact que les <strong>Mossi</strong> de la région de Dakola travaillent<br />

relativement peu durant .la majeure partie de l’année ; il ne sert pourtant à rien de les exhorter à travailler<br />

plus <strong>et</strong> mieux, car c’est l’ensemble de leur univers traditionnel qui est fondamentalement<br />

attaqué par le progrès - aussi bien leur organisation sociale <strong>et</strong> économique que leurs croyances ‘.<br />

K L’idée de bien, selon P. ILBOUDO (1968, p. 62), ne peut être séparée des notions d’immobilité <strong>et</strong><br />

d’immuabilité de l’œuvre de Dieu, conçue comme bonne <strong>et</strong> parfaite d’emblée ; par contre, le mal naît<br />

du changement qui est une dégradation de l’œuvre de Dieu. 1) Seule la transformation profonde des<br />

structures sociales <strong>et</strong> économiques sous l’influence de contraintes de fait - expansion démographique,<br />

pressions du système monétaire, nouvelles formes de compétition sociale <strong>et</strong> économique -- entraînera<br />

le passage d’une agriculture de subsistance à une agriculture commerciale <strong>et</strong> l’éclosion d’une conscience<br />

politique neuve sur les ruines de l’ancien système politique altéré par la colonisation. D’une certaine<br />

manière, c<strong>et</strong>te transformation est amorcée sur un double plan: au niveau des activités menées par les<br />

nouvelles élites politiques <strong>et</strong> au niveau des initiatives prises par les hommes qui reviennent <strong>dans</strong> leur<br />

pays après des mipations de travail. C’est à partir du moment où le développement a démarré que la<br />

’ vulgarisation agricole <strong>et</strong> l’assistance technique <strong>et</strong> économique deviennent vraiment efficaces, pour<br />

étayer <strong>et</strong> accélérer le mouvement.<br />

A mesure que le processus inéluctable de dégradation des structures traditionnelles se poursuivra,<br />

les nouvelles élites se trouveront de plus en plus libres pour innover <strong>dans</strong> les divers domaines<br />

de la vie sociale <strong>et</strong> économique, avec les moyens sociologiques <strong>et</strong> matériels que leur confère leur<br />

position privilégiée. Jusqu’à présent, ces élites ont investi leurs moyens <strong>dans</strong> l’univers traditionnel,<br />

selon des modes traditionnels ; leur comportement a entraîné une accélération du mouvement de<br />

décomposition de l’ordre ancien. Conscients de c<strong>et</strong>te situation, quelques hommes politiques <strong>et</strong><br />

certains fonctionnaires commencent à explorer une voie nouvelle : l’organisation rationnelle des<br />

activités de production <strong>et</strong> de commercialisation. Ainsi, l’aménagement des terroirs est un phénomène<br />

relativement nouveau en pays mossi, d’une importance considérable en tant que facteur de révohrtion<br />

de l’agriculture. Mais ces innovations techniques ne pourront se propager que parallèlement à l’évolution<br />

politique qui libèrera c<strong>et</strong>te société des contradictions actuelles <strong>dans</strong> les rapports de force entre<br />

1. La logique du système socio-économique traditionnel <strong>et</strong> les modalités anciennes de l’implantation humaine<br />

<strong>dans</strong> le milieu naturel suffisent pour rendre compte de l’inertie des cultivateurs en matière de production - motivations<br />

<strong>et</strong> technologie.<br />

Cf. les observations de portée générale de PAULME, 1963 (p. .6) : (( Ignorant les produits de luxe aussi bien que le<br />

profit à tirer de l’emploi d’une main-d’oeuvre salariée, pourquoi un homme aurait-il travaillé plus que le strict nécessaire,<br />

aménagé un espace plus grand que celui dont il avait besoin pour se nourrir, vendu ou ach<strong>et</strong>é un terrain alors que de<br />

vastes étendues restaient à défricher ? »

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