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Activités agricoles et changements sociaux dans l'Ouest Mossi ...

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CONCLUSION 167<br />

Dans le système agraire de Dakola, les cultures permanentes ou quasi permanentes tiennent<br />

la place privilégiée <strong>et</strong> les cultures temporaires ne jouent qu’un rôle secondaire. Il n’existe pas de<br />

véritable (( outfleld 1). Les champs temporaires sont pour une part des champs dispersés <strong>dans</strong> les<br />

zones périphériques du terroir, sans liens entre eux <strong>et</strong> sans relation fonctionnelle avec les zones de<br />

champs permanents ; mais la plupart des champs temporaires sont situés <strong>dans</strong> des zones proches de<br />

l’aire des champs permanents, <strong>et</strong> sont en voie de devenir des zones de culture semi-continue. Les<br />

champs temporaires de la seconde catégorie ne constituent pas un « élément stable d’une combinaison<br />

agricole )) mais un (( terme transitoire sur la voie de l’occupation permanente du sol, [ . ..] la frange<br />

pionnière [...] d ‘un infield en dilatation [. ..] autour d’une communauté aux effectifs croissants » l.<br />

Le terroir de Dakola ressemble à un type d’organisation agricole décrit par SAUTTER (1962, p. 47):<br />

« Dans différentes régions d’Afrique, il existe des (( couronnes de culture », culture continue ou semi-continue<br />

aux abords des lieux habités, culture sur défriche à la périphérie, sans lien fonctionnel entre l’espace intérieur <strong>et</strong> le<br />

pourtour. Faute d’une organisation agricole, drainant vers le centre des matières fertilisantes prélevées sur la couronne<br />

externe, ce dessin concentrique mime le dispositif infield - outfield. ))<br />

L’extension de l’aire de culture continue est particulièrement n<strong>et</strong>te depuis quelques années<br />

<strong>dans</strong> la zone des terres argileuses de colluvionnement, relativement riches. C<strong>et</strong>te intensification de<br />

la culture sans « transfert de fertilité » depuis les zones périphériques du terroir est possible grâce àla<br />

richesse naturelle de ces terres <strong>et</strong> moyennant quelques techniques élémentaires d’entr<strong>et</strong>ien des sols.<br />

Néanmoins, l’équilibre agronomique est de plus en plus compromis, l’expansion démographique<br />

mène inéluctablement à la rupture du système traditionnel.<br />

Le passage de l’exploitation des sols meubles <strong>et</strong> légers à l’exploitation des sols hydromorphes<br />

lourds <strong>et</strong> compacts, puis la mise en culture de plus en plus régulière des sols argileux ont constitué<br />

les premières étapes de l’adaptation des cultivateurs de Dakola aux conditions nouvelles créées par<br />

l’expansion démographique. L’aménagement des terres constitue une autre tentative d’adaptation.<br />

Et la culture sur billons <strong>dans</strong> la zone traditionnellement inculte de la cuv<strong>et</strong>te représente le dernier<br />

essai, original<strong>et</strong> audacieux, pour résoudre le problème du manque de terre. C<strong>et</strong>te évolution du système<br />

agraire se trouvera accélérée par I’assistance technique <strong>et</strong> financière apportée avec une efficacité<br />

croissante par les organismes chargés de la vulgarisation agricole, de l’organisation du crédit <strong>et</strong> de la<br />

commercialisation ; les localités voisines de Dakola en portent déjà la marque. t<br />

Pendant des siècles, les cultivateurs mossi se sont montrés assez peu industrieux au point de<br />

vue agricole ; leur capacité actuelle d’adaptation n’en est que plus remarquable. Mais les principaux<br />

artisans des progrès récents sont des individus marginaux par rapport aux groupes <strong>sociaux</strong> traditionnellement<br />

les plus attachés à l’agriculture 2. Les chefs <strong>et</strong> certains de leurs parents ont joué un rôle<br />

de premier plan <strong>dans</strong> la recherche <strong>et</strong> l’expérimentation de nouvelles formules de production 3, <strong>et</strong><br />

de même les anciens combattants, les fonctionnaires, les commerçants, des chrétiens <strong>et</strong> des musulmans,<br />

<strong>et</strong> d’une façon plus générale de nombreux individus qui échappent au contrôle social traditionnel.<br />

Leurs innovations contribuent à détruire les structures socio-économiques anciennes en<br />

même temps qu’elles constituent les voies d’avenir de c<strong>et</strong>te société : l’esprit d’entreprise <strong>et</strong> les moyens<br />

techniques <strong>et</strong> financiers mis en œuvre sapent l’égalitarisme économique traditionnel <strong>et</strong> valorisent<br />

les comportements individuels inspirés par la recherche du profit <strong>et</strong> de la puissance. Dans les circonstances<br />

actuelles, en l’absence de toute visée socialiste sur le plan national, le développement agricole<br />

engendre l’inégalité économique <strong>et</strong> sociale, <strong>et</strong> s’appuie sur elle pour progresser. Les agriculteurs les<br />

1. SAUTTER, 1962 (p. 47).<br />

2. Des observations semblables ont été faites <strong>dans</strong> d’autres pays de l’Afrique de l’ouest. Au Sénégal, P. PI?LE+<br />

SIER, 1966 (p. 157), a noté que (( ce sont [. ..] les agriculteurs les moins riches en techniques traditionnelles qui se<br />

révèlent les plus réceptifs aux innovations <strong>et</strong> les plus ouverts au progrès, alors que les authentiques paysans restent<br />

d’autant plus fermement attachés à leurs systèmes de production ancestraux que ceux-ci s’intègrent <strong>dans</strong> un legs du<br />

passé plus complexe, plus élaboré, mais aussi plus clos. ))<br />

3. Sans partager le parti pris de panégyriste de KABORE, 1966 (p. 120), on peut être de son avis lorsqu’il écrit:<br />

«Actuellement les Nakomsé sont de grands travailleurs, cultivateurs <strong>et</strong> éleveurs. II y a des naba qui travaillent bien<br />

plus que de véritables paysans [. . .]. 1)

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