Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

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toute éternité, les avait destinés à garder leurs
moutons et promis au ciel ou à l'enfer.
Un jour d'avril 1534, Calvin s'en fut à Nérac 1.
Ce dut être un effarement général quand on le
vit apparaître dans la grande salle «fort bien tapissée
et pavée » où se réunissaient une foule de dames,
demoiselles, secrétaires, médecins, aumôniers, valets
de chambre, sans compter les étrangers de
passage. Tous ces gens-là avaient en tête des pensées
fort différentes de celles du réformateur, et
se souciaient plus de l'agrément qu'ils tiraient
de leurs oeuvres que d'en connaître le mérite aux
regards de Dieu. Le Tout-Puissant, apparemment,
savait de toute éternité que les familiers de la
cour de Nérac feraient de grands libertins, et
qu'il permettrait à ses mauvais anges de les
pousser au jeu de la galanterie et des propos grivois,
car rien n'était plus dissolu que l'entourage
de la reine de Navarre, et sa cour donnait l'exemple
de la plus parfaite dépravation. Que venait donc
y faire Calvin ?
Il y voulait entretenir Marguerite d'Angoulême,
mère de Jeanne d'Albret, celle que Marot
appelait : « Corps féminin, coeur d'homme, et
teste d'ange ». Nous l'avons vu à Bourges, mariée
au Duc d'Alençon, puis elle avait épousé, à trentecinq
ans, Henri d'Albret qui en avait vingt-quatre,
et elle était venue à Nérac vers 1530.
Elle apportait aux choses de la religion un mysticisme
et une exaltation peu ordinaires. Elle
signait ses lettres à son directeur de conscience,
1. Châteauneuf, Jarnac, Barbezieux eurent aussi la
visite de Calvin.