Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

LA LUTTE 247
sent les serrures des portes avec des linges trempés
dans le pus des pestiférés, et se réjouissent sinistrement
de la funèbre besogne qu'ils accomplissent.
Il faut les rechercher, les juger, les envoyer au
supplice, et en même temps, courir vers tous les
agonisants afin de les consoler avec l'Évangile
avant
charmer.
que le tombereau des morts les verse au
Les prisons se remplissent, les bûchers s'allument.
Quinze femmes sont brûlées vives, et l'on
décide de châtier les hommes « plus rigoureusement
encore ». Beaucoup, pour éviter les tourments
atroces qui leur sont réservés, s'étranglent dans
leur prison. Et cependant, quoi qu'on fasse, si
effrayants que soient les châtiments, il y a toujours
des gens pour graisser les serrures. Les démons
enragés sont entrés dans le corps des hommes !
La femme d'un certain René avoue avoir tué
seize personnes par ses affreux sortilèges. Son
mari,
six.
lui, n'a réussi qu'à en faire mourir cinq ou
Les Genevois sont terrorisés. Des femmes se
jettent dans leur puits ou par leur fenêtre pour
échapper au fléau. Des plaintes s'échappent de
toutes les maisons. Aux premiers signes de peste
qu'ils voient apparaître sur eux, les gens entrent
en frénésie. On dirait alors qu'un esprit diabolique
s'est introduit dans leur corps pour en changer
la nature pesante et l'animer d'une vertu
étrange et merveilleuse. On voit courir comme
zèbres les plus gros, et les moins alertes font des
sauts de bateleur. C'est ainsi qu'un malheureux
pilier de taverne, franc blasphémateur au temps
de sa bonne santé, s'échappe de son lit où l'on
s'efforçait vainement de le retenir et passe par-