Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

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entrent jusqu'au poitrail. Il faut lutter contre le
courant, et leurs fers glissent sur les roches. Une
fois, l'un des cavaliers manque être emporté.
La chair des deux prédicants se hérisse sous leurs
habits ruisselants d'eau. La barbe de Calvin, dont
les poils se collent les uns aux autres, paraît encore
plus longue, plus maigre, et le pasteur grelotte
sur sa selle.
On dirait que la malédiction du Seigneur s'étend
sur eux.
Ils arrivent à Bâle le 5 ou le 6, exténués, et y
trouvent la peste. Elle sévit avec rage. Pour se
remettre de leurs fatigues et de leurs chagrins, ils
ne voient plus que cercueils et cadavres. Ils croisent
des gens verdis par leurs coliques, des mourants
qui hurlent leur dernier hoquet, des médecins
vêtus de gros cuir et couverts de lunettes, tout
un appareil funèbre de bassins, de linceuls, de
tombereaux. Mais ils sont si las, si découragés
qu'ils ne s'en effraient même pas. Ils renvoient
leurs chevaux et s'installent au collège de la ville,
chez leur ami Oporin, qui cumule les fonctions
de directeur, professeur et imprimeur. Ils sont
dénués de tout et, pendant deux mois, Oporin
paie la nourriture et le vin, dont ils ne le rembourseront
qu'en octobre.
Le souvenir de Genève poursuit Calvin, qui est
toujours dans la plus grande agitation. Il va du
remords à la colère, s'emporte jusqu'à l'injure, et
la crise passée, pleure dans les bras de Farel. Il
vient encore de gravement pêcher en s'abandonnant
à son indignation ! Il aurait fallu être modéré,
et il a répandu toute son amertume ! Alors il
gémit :