Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

A NOYON 15
de pieux exercices, qu'il y en avait de plus profanes
à quoi elle ne répugnait point, et qu'elle
faisait fort bien d'aller souvent à confesse. Elles
la prétendaient une femme « de mauvais bruit ».
Mais c'étaient là propos méchants de commères
envieuses. La belle dévote avait assez d'occupations
avec ses quatre enfants à élever, ses servantes
à gouverner, ses processions et ses reliques, pour
ne point perdre son temps en des pratiques coupables
qu'elle savait expressément condamnées
par l'Église, et fort propres à la mener, après sa
mort, en un lieu que par ailleurs elle s'efforçait
d'éviter.
L'Église faisait alors une grande dépense de
reliques, et Noyon-la-Sainte, à cet égard, était
fort bien pourvue.
On y trouvait, en plus du fragment de la couronne
d'épines, quelques cheveux de Saint Jean-
Baptiste, et l'Église de la Madeleine possédait,
à elle seule, de la manne que Dieu avait fait pleuvoir
dans le désert, un morceau des trois pains dont
Jésus avait rassasié cinq mille hommes, et une
dent de Notre-Seigneur. On conçoit quel orgueil
elle pouvait tirer de la possession de pareils trésors,
et combien d'envieux ils devaient lui susciter.
Le siècle était aux reliques. C'était une furie.
Toutes les églises en voulaient posséder, tous les
fidèles brûlaient du désir d'en contempler, et c'est
en se souvenant de toutes celles qu'il avait baisées
en ses jeunes ans que Calvin devait plus tard
écrire son Traité des Reliques. Ne montrait-on
pas, à Chartres, une chemise de la Vierge, ailleurs
un morceau de poisson rôti que Saint Pierre avait
présenté au Christ, lorsqu'après sa mort Il lui