Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

LA LUTTE 251
l'on pouvait aller, à le suivre, pour peu qu'on eût
de la logique. Il n'avait point goûté cette façon
imprévue d'appliquer les théories de l'Institution
chrétienne, et s'était déclaré favorable au divorce
d'Ameaux d'avec une créature aussi impudique.
En dépit de ce jugement du réformateur, le
Consistoire n'avait pas estimé que le mari dût se
séparer de sa femme, et le pauvre Ameaux s'était
vu contraint de vivre avec son épouse jusqu'à ce
qu'elle se fût livrée à de tels débordements que
la moralité publique avait exigé qu'on ne laissât
plus longtemps en liberté une aussi terrible personne.
Depuis lors, Ameaux avait pu se remarier
en toute sécurité. Son ancienne femme croupissait
dans une prison, où on l'avait rivée pour toujours
à une chaîne de fer.
Ameaux
heureux.
devrait donc se trouver pleinement
Cependant nous avons vu que la fermeture des
maisons de jeu l'a mis en fureur. C'est là, dit-il,
encore un coup de ces damnés Français à qui l'on
doit tant d'abominables inventions, dont le Consistoire
n'est pas la moins funeste.
Il invite à dîner quelques amis, et tient à table
un grand discours contre Calvin. Il déclare que
sa doctrine est fausse, que c'est un méchant
homme et un séducteur, un Picard qui veut devenir
évêque, que le magistrat « ne fait pas un pet sans
l'avoir consulté », que, si l'on n'y prend garde,
les Français gouverneront la ville, etc..
C'est tout le Credo du parti libertin qui lui sort
de la bouche au bruit joyeux des flacons et des
verres entrechoqués. Ses amis applaudissent
bruyamment à ses paroles, puis, le dernier morceau
avalé, s'empressent d'aller le dénoncer au