Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

L'ÉVOLUTION 63
Le roi, à l'instigation de Budé et de Cop, venait,
en mars 1530, d'instituer les Lecteurs royaux,
et Calvin qui voulait devenir homme de lettres,
s'empressa de profiter de leurs leçons. Aussi le
voyait-on courir du collège de Cambrai ou des
Trois Évêques à celui de Tréguier, car les lecteurs
royaux n'avaient pas de chaire fixe et ne donnaient
que des cours. Pierre Danès et Jacques
Toussaint y enseignaient le grec, François Vatable,
Agatias Guidacérius et Paul Paradis, l'hébreu.
Il y avait loin de ces cours libres, ouverts à
tous et animés de l'esprit du siècle, au vieux collège
Montaigu, où Calvin avait subi l'éducation
du moyen-âge avant que Cordier et Wolmar
l'eussent initié aux idées nouvelles. Maintenant,
avec les lecteurs royaux, il assistait au triomphe
de la révolution littéraire. Il n'y avait plus de
grades obligatoires, plus de licence pour enseigner,
plus de frais d'études arbitraires et monstrueux,
mais des cours indépendants, gratuits, dont tout
le monde pouvait profiter. Le latin n'y régnait
plus en seigneur et maître. Le grec et l'hébreu
envahissaient l'école. L'esprit remplaçait la lettre.
C'était un enseignement rival de celui de la
Sorbonne, qui le déclarait téméraire, scandaleux,
faux, impie, pernicieux, et véhémentement suspect
de luthérianisme.
Calvin y rencontra peut-être Marot, qui se
préparait à sa traduction des psaumes, peut-être
aussi Ignace de Loyola, François-Xavier, Rabelais.
Entre les cours, il retrouvait un cercle d'amis
très cultivés. Il fréquentait chez les Cop, et se
montrait grand admirateur de Budé, « la première
gloire et l'appui des lettres. » Budé et Cop étaient
du groupe fabrisien et ne devinrent jamais pro-