Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

LA LUTTE 259
fièvre ne la quitte plus, la toux la secoue sans
arrêt, ce qui rend ses douleurs habituelles encore
plus pénibles, et c'est pitié de la voir se traîner
pour accomplir sa besogne quotidienne. Calvin
la regarde... Une grande tristesse emplit son
coeur. Peu d'épouses, se dit-il, ont autant de
vertu et de sagesse qu'Idelette de Bure. Jamais
la moindre discussion ne s'est élevée entre eux,
et le mari s'émeut à penser que sa femme évite
de se plaindre et de parler d'elle-même pour qu'il
ne s'inquiète pas de son état. Idelette ne dit rien
non plus de son fils, resté à Strasbourg, et qu'elle
ne peut reprendre avec elle... Cependant, le pasteur
sait bien que la pauvre femme souffre de ne pas
l'avoir en sa maison...
Une grande tendresse monte au coeur de Calvin,
qui se répète les paroles de saint Paul : « Nul ne
s'aime soi-même, qu'il n'aime sa femme. » Il se
plaît à dire que « le lien le plus sacré que Dieu
ait mis entre nous est du mari avec la femme...
Le mariage est une figure de l'union sacrée que le
Fils de Dieu a avec tous les fidèles. »
Il admire la pudeur de la veuve de l'anabaptiste
et, s'interrompant un instant de dicter son
volumineux courrier, écrit à un ami pour essayer,
par une tierce personne, d'obtenir que le fils de
sa femme lui soit rendu 1.
Triste maison, tristes époux ! On ne sait lequel
des deux souffre le plus de maux.
1. Le 31 août 1545 Calvin écrit à Hubert : « Il (Petrus
Teschius) est le seul par qui nous espérons que le fils
de ma femme puisse nous être rendu. »
Dans sa lettre du 24 janvier 1546 : « S'il (Teschius)
peut jamais faire quelque chose pour lui, il me trouvera
toujours très prêt et il reconnaîtra que je ne serai pas
oublieux de son service. »