Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

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La colère est toute prête à le saisir, mais, cette
fois, elle ne sera pas la plus forte. Le pasteur se
souvient de ses propres fautes, et cela le remplit
d'humilité. Il s'excuse auprès des échevins d'avoir
tant tardé à revenir, et s'offre à être toujours
serviteur de Genève.
Quelle vengeance médite cet homme, que l'on
vient de rappeler après l'avoir ignominieusement
chassé de la ville ? Que doit-on attendre de lui,
et quelle pénitence va-t-il prétendre imposer aux
Genevois ? Ceux-ci se le demandent avec une
grande anxiété, et de nouveau la foule remplit
l'église Saint-Pierre, dès le lendemain du retour
du proscrit. Tous les regards sont braqués sur la
chaire de bois ornée de ses maigres colonnes en
spirale.
Elle est vide encore, et l'on aperçoit le haut du
dossier de la chaise... Mais une main osseuse glisse
au long de la rampe cirée et il apparaît, tel qu'on
l'a vu tant de fois, jaune, creux, le crâne couvert
de son serre-tête noir. Il promène ses regards
luisants sur l'assistance, il se penche, un peu, tout
prêt à parler... et le peuple consterné laisse échapper
comme une plainte. Après l'avoir outragé, on
a montré qu'on ne pouvait se passer de lui. Quelles
paroles foudroyantes sont prêtes à sortir de sa
bouche ? Se sentant le maître, que va-t-il exiger
en réparation de « l'atroce injure » faite à Dieu
et à son ministre ?
Sa bile se remue. Maître Calvin se souvient des
épées nues que brandissaient les poings, lors de
son dernier prêche, des bâtons levés, des cris de
mort. Le diable de la vengeance se démène,
enfermé avec le réformateur dans l'étroite cage
de bois d'où l'on voit sortir le buste vêtu de la