Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

224 CALVIN
cesse souhaité le repos, et aussi l'établissement de
sa foi, et toujours sacrifié celui-là à celui-ci,
chaque fois contre son gré, et s'épuisant dans cette
lutte d'une partie de sa nature contre l'autre ». 1
Si les consolations de ses amis ne le soutenaient,
il mourrait de chagrin. C'est lui qui l'affirme.
Et le froid mord de plus belle. Partout les rivières
sont gelées. Les ornières brillent, les arbres laissent
pendre de longues larmes de givre que le chariot
secoue en passant. Les pasteurs transis et recro-
quevillés dans leurs fourrures tapent du pied pour
se réchauffer.
Ils passent par Tubingen, qui paraît à Calvin
un pays « assez agréable ». A l'auberge d'Ulm,
le 1er mars 1540, pendant que ses amis discutent
pour savoir s'ils iront à Ratisbonne à cheval,
ou en radeau dans le cas où le Danube viendrait
à se dégeler, il écrit à Farel qui le menace de ses
foudres s'il ne répond pas à l'appel de Genève :
Tu m'as violemment effrayé et consterné par tes
foudres, ces foudres avec lesquelles, je ne sais pour
quelle cause, tu tonnes de si étrange manière. Tu sais
bien que j'ai redouté cet appel, mais que je ne l'ai pas
fui. Pourquoi donc m'attaquer avec une telle impétuosité
que tu m'as presque dénoncé notre amitié ?
En arrivant, les Strasbourgeois ont appris que
l'Empereur est à Ratisbonne depuis le 23, et ils
se sont épouvantés de leur retard, mais on les
rassure en leur disant que les négociations ne
commenceront pas avant quinze jours.
Enfin la glace du Danube commence à fondre.
Les pasteurs renvoient les chevaux du char et,
1. Seizième siècle. Etudes littéraires, par Emile Faguet.