Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

VERS L'EXIL 121
des vomissements et des diarrhées presque continuels
! Des chevaux de fortune secouaient sa
colique sur leur échine, ou bien il était à pied et
il lui fallait
d'insomnie,
marcher,
le mal de
malgré la fatigue,
tête,
la nuit
— car il ne connut
jamais d'autre façon de voyager qu'au dos d'une
bête, ou arpentant les routes, suant au soleil et
tout poudreux, ou les habits collés à la peau par
l'averse du ciel. Et quand il arrivait à l'étape,
rêvant de repos, de solitude, de silence, et d'un
bon feu qui eût réchauffé ses os glacés, il lui fallait,
ou se cacher, ou prêcher les inconnus qui accouraient
vers lui. Car Dieu continuait de lui susciter
partout des gens qui réclamaient ses prêches, et il
n'y avait plus pour lui de lieux écartés ni déserts.
Sans cesse Calvin devait violenter sa nature sauvage
et honteuse afin de répandre la parole du Christ.
A Desmes, près de Metz, l'un des domestiques
des deux amis déroba la bougette où ils avaient
mis tout leur argent et emmena l'un des chevaux.
On imagine sans peine la colère et la détresse des
fugitifs, quand ils se virent ainsi démunis de toutes
espèces sonnantes, en la pleine campagne d'un
pays étranger où ils se prétendaient ce qu'ils
n'étaient pas et n'avaient que les auberges pour
les nourrir et les coucher. L'autre serviteur dont
ils se faisaient accompagner les tira d'embarras
en donnant les six écus qu'il possédait pour les
mener à Strasbourg. Là, des amis, sans doute,
leur prêtèrent l'argent nécessaire à la fin du voyage,
car ils furent bientôt à Bâle, où Calvin montra
la plus vive satisfaction d'avoir retrouvé son bon
ami Cop, qu'il n'avait pas revu depuis le jour du
mois de novembre 1533 où, jetant étole et bonnet
à la rue, et plantant là ses bedeaux, le recteur