Calvin / Jean Moura et Paul Louvet. 1931. - Bible et Rencontres

LA LUTTE 243
lui. En effet, Sébastien Castellion, que Monsieur
Calvin a appelé à Genève pour le mettre à la tête
de son collège, porte un jugement différent de
celui du Réformateur sur ce poème et, pour cette
divergence d'opinions, en vient bientôt à résigner
ses fonctions. Calvin a déclaré que le Cantique des
Cantiques était un livre saint, alors que Castellion
ne veut voir en Salomon, quand il fit le chapitre
septième, qu' « un homme en folie, conduit par
mondanités et non par le saint-Espiit ». Il tient
le Cantique pour un poème lascif et obscène où
Salomon décrit des amours impudiques.
Ce Castellion est enragé contre le réformateur.
Il le poursuit de sa haine, se dresse sur son che-
min, s'introduit à sa suite dans tous les lieux publics
où sa charge le fait entrer, l'interrompt, le contredit,
et, une fois que Calvin explique le texte de
saint Paul : " nous montrant en toutes choses
ministres de Dieu » devant une soixantaine de
personnes réunies dans le temple de l'Auditoire,
se lève et, au grand scandale de tous, apostrophe
brutalement le pasteur.
Cette fois encore, Calvin, fidèle à l'attitude qu'il
s'est imposée, se tait et dévore l'outrage en silence.
Mais il ne peut pousser la vertu évangélique jusqu'à
l'oubli de l'injure. Il va porter plainte aux syndics,
qui blâment Castellion, lequel, un mois plus
tard, quitte la ville.!
Calvin ne s'occupe pas seulement de l'Église ;
il est devenu un homme politique. Il fait partie
d'une commission chargée de la révision de la
Constitution civile. Depuis l'affranchissement de
Genève, bien des règlements sont périmés, et l'on
en attend d'autres, qui devront s'écarter le moins
possible des coutumes et des usages. Calvin et le