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Mise en page 1 - Théâtre Massalia

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L’écriture au théâtre jeune public - Emerg<strong>en</strong>ce d’un nouveau langage ou nouveau rapport au public ? (1ère partie)<br />

Anne Luthaud<br />

Alors, <strong>en</strong> fait, j’avais travaillé avec Anne-Marie sur une pièce pour adultes, « Les<br />

Monologues de Femmes », et j’ai aimé travailler avec elle <strong>en</strong> raison de la manière qu’elle<br />

a de faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre la langue, justem<strong>en</strong>t. Je suis touchée par une att<strong>en</strong>tion particulière<br />

qu’elle a, aux mots et à la manière de dire. Ça a été comme une sorte de commande.<br />

Anne-Marie m’a demandé un texte pour <strong>en</strong>fants. Elle avait <strong>en</strong>vie de faire un spectacle sur<br />

la couleur. J’ai réfléchi à la couleur. Ça a donné ce texte « Le Bleu de Madeleine et les<br />

Autres ». Je suis partie des mots de la couleur. Je n’ai pas p<strong>en</strong>sé à comm<strong>en</strong>t j’allais écrire<br />

pour des <strong>en</strong>fants. Je suis partie des mots du bleu, des mots du jaune, etc… Le principe<br />

du texte, c’est une petite fille qui cherche le plus beau bleu de la terre, les mots du rouge<br />

et comm<strong>en</strong>t on fait le jaune. Il y avait une manière <strong>en</strong>core une fois pour moi de partir du<br />

langage. C’est toujours ma manière de travailler, c’est à dire de chercher, de la même<br />

façon quand j’écris pour les adultes, à ne pas être dans une écriture normée, à ne pas<br />

être dans la conv<strong>en</strong>tion de la langue, à ne pas être dans les lieux communs, ce qui est<br />

att<strong>en</strong>du et ce qui est conv<strong>en</strong>u.<br />

Ce qui m’intéressait de le faire pour les <strong>en</strong>fants, <strong>en</strong>fin, à l’att<strong>en</strong>tion des <strong>en</strong>fants, c’est<br />

parce que j’ai l’impression, justem<strong>en</strong>t, qu’ils ont une att<strong>en</strong>tion particulière aux codes de<br />

la langue. Ils sont att<strong>en</strong>tifs aux codes. Ils ne les connaiss<strong>en</strong>t pas. On peut les am<strong>en</strong>er à<br />

faire un pas de côté par rapport à ces codes. C’est ce qui m’intéresse beaucoup dans<br />

l’écriture à l’att<strong>en</strong>tion des <strong>en</strong>fants : de pouvoir écrire un peu à côté et le de les faire <strong>en</strong>trer<br />

dans cet à côté de la langue qui est simple. On sait comm<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>fants s’arrêt<strong>en</strong>t sur<br />

des expressions. L’autre jour je parlais avec un <strong>en</strong>fant qui me disait qu’il savait ce que<br />

c’était d’avoir un poil dans la main par exemple. Je lui dis que c’est donc être paresseux,<br />

qu’on a pas forcém<strong>en</strong>t <strong>en</strong>vie de travailler. Il m’a dit : « Non, pas du tout, c’est qu’on a un<br />

poil qui pousse dans la main, et qu’on le voit ce poil ». Ce sont ces choses là. Comm<strong>en</strong>t<br />

on pousse les codes de la langue, et jusqu’où on peut aller.<br />

Dominique Bérody<br />

Dans le processus d’écriture à proprem<strong>en</strong>t parler, c’est à dire le mom<strong>en</strong>t où, <strong>en</strong> effet, on<br />

écrit, est-ce que pour toi, il y avait dans un coin de ta tête que ça allait être adressé à des<br />

<strong>en</strong>fants, ou est-ce qu’au contraire tu travaillais plutôt à scruter les couleurs, les faire parler,<br />

et trouver dans cette recherche les mots justes, qui dans un deuxième temps, serai<strong>en</strong>t<br />

incarnés et destinés aux <strong>en</strong>fants ? La-dessus, comm<strong>en</strong>t s’est passée la collaboration avec<br />

Anne-Marie Marques ?<br />

Anne Luthaud<br />

Il y avait cette idée <strong>en</strong>core une fois de partir des mots et de la couleur, avec l’idée que,<br />

comme le disait tout à l’heure Monsieur B<strong>en</strong> Soussan, il y a une culture, un passé, une<br />

connaissance de la langue que n’ont pas les <strong>en</strong>fants. Il y a donc une manière d’<strong>en</strong>trer<br />

dans ces mots, qui est la fois de leur offrir, leur donner et <strong>en</strong> même temps, de pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong><br />

compte le fait qu’ils ne les connaiss<strong>en</strong>t pas toujours. Je suis partie de la matière, des couleurs<br />

comme je l’aurais fait avec n’importe quel texte, sauf que j’avais <strong>en</strong> tête que c’était<br />

à destination d’<strong>en</strong>fants qui n’avai<strong>en</strong>t pas forcém<strong>en</strong>t les mots, la même construction. Il ne<br />

s’agit pas seulem<strong>en</strong>t des mots. Les <strong>en</strong>fants peuv<strong>en</strong>t être très curieux de mots qu’ils ne<br />

connaiss<strong>en</strong>t pas, qui sont exceptionnels et rares. Il y a des questions de construction, de<br />

syntaxe. C’est une chose qui m’arrête souv<strong>en</strong>t dans la littérature jeunesse, quand je lis<br />

des livres à des <strong>en</strong>fants petits, je me s<strong>en</strong>s parfois obligée de modifier une construction<br />

de phrase, parce que j’ai l’impression qu’il y a une structure et une syntaxe qui ne pr<strong>en</strong>d<br />

pas <strong>en</strong> compte l’<strong>en</strong>fant tel qu’il p<strong>en</strong>se. Et il n’<strong>en</strong> est pas forcém<strong>en</strong>t à cet <strong>en</strong>droit là de la<br />

construction de la langue.<br />

Dominique Bérody<br />

Ça se traduit comm<strong>en</strong>t ce ress<strong>en</strong>ti que tu as que parfois, dans ce que l’on lit dans les<br />

livres pour <strong>en</strong>fants à propos de la syntaxe ? Quel est, de ton point de vue, ce qui manque,<br />

pour qu’on retrouve cette scansion qui serait nécessaire pour que, dans le rythme<br />

même, il y ait la relation avec l’<strong>en</strong>fant ? As-tu des exemples concrets qui te vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ou<br />

est-ce que au travers de ton écriture, tu p<strong>en</strong>ses qu’on peut le retrouver ?<br />

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