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Mise en page 1 - Théâtre Massalia

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Ecriture et notation musicales : L’écriture et l’espace par Nicolas Frize<br />

lumières. Il y a à peu près 600 personnes qui peuv<strong>en</strong>t s’asseoir, qui sont dans toutes les<br />

directions. Chacun regarde ailleurs. On avait mis les chaises comme ça, les g<strong>en</strong>s ne pouvai<strong>en</strong>t<br />

pas les déplacer, c’était trop serré. Les g<strong>en</strong>s s’assey<strong>en</strong>t, les musici<strong>en</strong>s jou<strong>en</strong>t de<br />

part et d’autre, et déambul<strong>en</strong>t le long des trottoirs dans un s<strong>en</strong>s perp<strong>en</strong>diculaire aux<br />

trains qui vont passer dans l’autre s<strong>en</strong>s. Il y a une bande magnétique. Toutes les musiques<br />

se mélang<strong>en</strong>t, les instrum<strong>en</strong>tistes, le train et la bande.<br />

On est dans une espèce de lieu de r<strong>en</strong>contre, posé dans<br />

Pr<strong>en</strong>dre le réel et de le<br />

mettre de force dans la<br />

musique, pour qu’il y ait<br />

une confusion et non pas<br />

une distinction<br />

des conditions d’écoute assez privilégiées, sous les<br />

rails. On ne sait jamais si le train est dans la bande<br />

magnétique, dans la musique ou si c’était vraim<strong>en</strong>t le<br />

train. Mon idée, c’est de pr<strong>en</strong>dre le réel et de le mettre<br />

de force dans la musique, pour qu’il y ait une confusion<br />

et non pas une distinction. Ça donne ça. Le public est<br />

assis, on voit des g<strong>en</strong>s de dos, de face. C’est l’arrivée.<br />

Les instrum<strong>en</strong>tistes sont sur le côté. Il y a un bassoniste,<br />

un baryton. Les musici<strong>en</strong>s n’arrêt<strong>en</strong>t pas de se<br />

déplacer. Ils emport<strong>en</strong>t leurs partitions, il y a des pupitres<br />

partout. Il y a une harpe sur un plateau mobile qui avance le long des trottoirs, poussé<br />

par deux personnes qui sont assez discrètes. Elle avance très doucem<strong>en</strong>t, pour que tout<br />

le monde ne soit pas toujours à côté de la harpe. C’est une harpe qui s’<strong>en</strong> va, et qui<br />

revi<strong>en</strong>t.<br />

Tout ça est très anecdotique dans le concert. En fait, vous êtes assis dans un <strong>en</strong>droit très<br />

inatt<strong>en</strong>du, dans un tunnel. Une musique comm<strong>en</strong>ce, et vous réalisez que la harpe est partie,<br />

mais vous ne l’avez pas vue partir. Elle n’est pas sur un moteur. En fait, vous ne réalisez<br />

même pas qu’elle est partie. Les musici<strong>en</strong>s se déplac<strong>en</strong>t et tout ça n’est pas important.<br />

C’est juste que c’est un <strong>en</strong>droit qui n’arrête pas de vivre. Il existe. Il n’est pas posé.<br />

Ce chanteur, là, vi<strong>en</strong>t de traverser le public, pour rejoindre le baryton, et il va repartir.<br />

Au bout d’un mom<strong>en</strong>t, les g<strong>en</strong>s ferm<strong>en</strong>t les yeux, s’abandonn<strong>en</strong>t complètem<strong>en</strong>t. Ils ne<br />

s’intéress<strong>en</strong>t plus à la scénographie. Ils se dis<strong>en</strong>t que maint<strong>en</strong>ant qu’ils ont compris où<br />

ils étai<strong>en</strong>t, ils ont compris ce qu’il se passe, ils sav<strong>en</strong>t qu’ils sont sous terre, que des<br />

trains vont passer, maint<strong>en</strong>ant qu’ils sav<strong>en</strong>t tout ça, ils se dis<strong>en</strong>t qu’ils peuv<strong>en</strong>t écouter<br />

la musique et fermer les yeux. Ils ne regard<strong>en</strong>t plus. Ils ne cherch<strong>en</strong>t pas à suivre ce qui<br />

se passe. Ils sont dans un espace qui a de la vie, dont ils compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la finalité, mais<br />

qui finalem<strong>en</strong>t dont l’anecdote n’est pas importante parce que c’est acquis que ce lieu<br />

est <strong>en</strong>train de vivre. Et ça n’est pas pareil que si on est dans une salle. Vraim<strong>en</strong>t pas<br />

pareil. Même si on ne regarde ri<strong>en</strong>.<br />

Je m’intéresse dans cette création à des vocabulaires intermédiaires qui serv<strong>en</strong>t à des<br />

artistes à s’exprimer vis à vis d’autres <strong>en</strong> passant par le graphisme. C’est à dire que le<br />

compositeur ne fait pas de musique. Ce n’est pas un musici<strong>en</strong>, c’est un dessinateur. Je<br />

passe mon temps à dessiner. Je n’écris pas sur l’ordinateur, j’écris sur le papier. Je ne fais<br />

C’est à dire que le compositeur ne fait pas de musique.<br />

Ce n’est pas un musici<strong>en</strong>, c’est un dessinateur.<br />

Je passe mon temps à dessiner.<br />

pas de musique. J’ai arrêté d’<strong>en</strong> faire il y a longtemps. Je ne peux pas être compositeur et<br />

instrum<strong>en</strong>tiste <strong>en</strong> même temps, je suis graphiste. Pour m’exprimer, je ne fais que dessiner,<br />

je ne fais qu’écrire. J’ai plein de stylos différ<strong>en</strong>ts, plein de crayons, plein de papiers.<br />

Je ne suis pas le seul à faire ça. L’architecte ne construit pas des maisons, il est graphiste.<br />

Le styliste, <strong>en</strong> mode, il ne coud pas, il ne fait pas les vêtem<strong>en</strong>ts, il ne fait que des dessins.<br />

On est plusieurs professions qui pass<strong>en</strong>t par des intermédiaires, pour s’exprimer vis à vis<br />

de g<strong>en</strong>s qui vont interpréter nos dessins pour compr<strong>en</strong>dre que ce qui est à faire, à jouer,<br />

n’est pas ce qui est dessiné mais ce qui est à l’intérieur de l’int<strong>en</strong>tion du dessin et dont le<br />

dessin est le prétexte. C’est à dire que nous avons des dessins au s<strong>en</strong>s de « desseins »,<br />

qu’on manifeste par des dessins, mais le dessin est bi<strong>en</strong> pauvre par rapport à ce qu’on<br />

veut faire, et c’est pour ça qu’il y a autant d’interprétations de « La Passion selon Saint<br />

Jean » de Bach, parce que tout n’est pas écrit. Il y a même pas grand chose d’écrit. C’est<br />

un peu de la provocation. Mais quand on voit les versions différ<strong>en</strong>tes, on se dit qu’il y a<br />

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