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Mise en page 1 - Théâtre Massalia

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La solitude, proposé par La P<strong>en</strong>sée de Midi<br />

figure curieuse, mais c’est comme si c’était une nécessité ou une possibilité intellectuelle<br />

que parfois on appelle l’exil. Juste pour donner un exemple. Moi dans la tradition<br />

poétique d’où je vi<strong>en</strong>s, j’ai travaillé avec le vers libre. Le vers libre c’est une chose. La<br />

question des formes fixes se posait pour moi comme un héritage dont je ne savais pas<br />

quoi faire. Il se trouve que cet héritage des formes fixes, je l’ai trouvé à travers deux choses.<br />

C’est un détour par le Japon, où j’ai compris ce qu’était la valeur substantielle du<br />

vide, et qui m’a permis de compr<strong>en</strong>dre ce que pouvait être un rythme fixe. Par exemple<br />

un rythme de 10 pieds ou de 12 pieds, où ce qui m’intéressait était moins la stabilité du<br />

vers que l’intervalle <strong>en</strong>tre les temps qui dev<strong>en</strong>ait important. La deuxième chose qui m’a<br />

permis d’accéder à ça, c’est un détour par l’histoire, à travers la question des natures<br />

mortes, et plus particulièrem<strong>en</strong>t des natures mortes espagnoles. Finalem<strong>en</strong>t on est toujours<br />

<strong>en</strong>train de se détourner pour essayer de se voir soi-même.<br />

Zad Moultaka<br />

Mais comm<strong>en</strong>t par la nature morte espagnole ?<br />

R<strong>en</strong>aud Ego<br />

Ah ! Comm<strong>en</strong>t par la nature morte espagnole, c’est tout d’un coup la question du vide,<br />

comme substance. Si j’avais eu cette intuition, <strong>en</strong> séjournant plusieurs fois au Japon que<br />

c’était comme ça que je pouvais réinvestir un rythme régulier, ça n’était pas suffisant. Il<br />

se trouve que j’avais besoin d’une figure presque visuelle. Ce que m’a donné la nature<br />

morte, c’est que, quels que soi<strong>en</strong>t les objets qu’on pouvait poser ou disposer sur une<br />

table par exemple, trois pommes, ou je p<strong>en</strong>se à une nature morte espagnole qui pour<br />

moi a beaucoup compté, c’est une peinture de Zurbaran où il y a trois pots <strong>en</strong> terre et<br />

une coupe d’étain. Et bi<strong>en</strong> la force de cette peinture ne t<strong>en</strong>ait pas à ces figures, mais à<br />

l’articulation <strong>en</strong>tre elles et au fait que c’était le vide <strong>en</strong>tre elles qui leur permettai<strong>en</strong>t de<br />

dev<strong>en</strong>ir un objet commun. C’est comme ça que j’ai pu rev<strong>en</strong>ir questionner des formes<br />

fixes, qui étai<strong>en</strong>t aussi des formes justes pour essayer de parler de quelque chose dont<br />

le mouvem<strong>en</strong>t, pour moi, aujourd’hui était problématique. Justem<strong>en</strong>t cette question de<br />

la prose. Justem<strong>en</strong>t cette question de l’histoire qu’on s<strong>en</strong>t un peu bégayer, qu’on s<strong>en</strong>t un<br />

peu être dans une situation de répétition, à ce mom<strong>en</strong>t là, la répétition, la scansion<br />

retrouvait un s<strong>en</strong>s. Elle était pour moi une forme qui pouvait être réinvestie d’un s<strong>en</strong>s<br />

au-delà de la répétition comme rythme, comme marche, comme ordre, comme cosmos.<br />

Parce que c’est ça, un sonnet, c’est construit comme quelque chose d’extrêmem<strong>en</strong>t stable<br />

avec une répétition, une scansion, un accomplissem<strong>en</strong>t, mais cette forme là, dans sa<br />

globalité, elle r<strong>en</strong>voit à un cosmos qui a totalem<strong>en</strong>t volé <strong>en</strong> éclats. Donc je ne pouvais<br />

plus m’<strong>en</strong> servir. En revanche, des formes de rythme stable, relativem<strong>en</strong>t stable, et bi<strong>en</strong><br />

je pouvais les réinvestir. Ce ne sont pas finalem<strong>en</strong>t des rythmes pairs que j’ai réinvestis,<br />

c’est peut-être comme ça que je m’<strong>en</strong> sortais, mais ce sont des rythmes impairs parce<br />

que dans les rythmes impairs, le temps fort va tomber sur le vide. Il va tomber sur le creux<br />

c’est à dire, <strong>en</strong>tre les choses. Je vais avoir un rythme qui ne va pas chanter, il va déchanter.<br />

Il va même être un peu dans une espèce de bégaiem<strong>en</strong>t. Alors tout ça, ce temps mort,<br />

ce temps vide, ce bégaiem<strong>en</strong>t et <strong>en</strong> même temps la recherche d’une forme dont j’avais<br />

besoin pour essayer de redonner forme à quelque chose qui était justem<strong>en</strong>t, qui ne pouvait<br />

pas t<strong>en</strong>ir dans la forme du vers libre, et bi<strong>en</strong> curieusem<strong>en</strong>t, il a fallu que j’aille la<br />

trouver à travers la question du vide au Japon, et puis dans un autre détour historique<br />

avec l’apparition de la nature morte.<br />

Thierry Fabre<br />

Moi je voudrai rajouter, pour connaître un peu le travail d’écriture de R<strong>en</strong>aud Ego, un<br />

autre déplacem<strong>en</strong>t, qui n’est pas dans le rythme cette fois ci mais dans la figure, dans<br />

l’image, qui est, je p<strong>en</strong>se que ça vaut la peine aussi parce que c’était une quête solitaire,<br />

de la peinture rupestre des salles ? Peut-être que R<strong>en</strong>aud peut vous expliquer brièvem<strong>en</strong>t<br />

cette trajectoire là parce que c’est assez extraordinaire, y compris dans la découverte qui<br />

a été faite de ces images rarissimes que l’on trouve <strong>en</strong> Afrique du Sud.<br />

R<strong>en</strong>aud Ego<br />

C’est difficile de tout résumer, mais je vais le dire <strong>en</strong> quelques mots. Il y a <strong>en</strong> Afrique<br />

Australe des peintures très belles, qui sont ce qu’on appelle de l’art pariétal, des peintures<br />

rupestres, qui sont peu connues. Maint<strong>en</strong>ant, le site comm<strong>en</strong>ce à être connu. Mais<br />

lorsque j’ai vu ces peintures et pour certaines d’<strong>en</strong>tre elles, je les ai découvertes, c’était<br />

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