Mise en page 1 - Théâtre Massalia
Mise en page 1 - Théâtre Massalia
Mise en page 1 - Théâtre Massalia
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
La solitude, proposé par La P<strong>en</strong>sée de Midi<br />
sur ce qui vi<strong>en</strong>t d’être dit. Chacun avec ses moy<strong>en</strong>s propres cherche quelque chose.<br />
Trouver, dans une vieille acception du terme, c’est tourner. On tourne. Alors, quand je<br />
vois un danseur qui tourne sur lui-même, comme ça, je p<strong>en</strong>se aussi à la roue et je sais<br />
que pour que la roue tourne, pour qu’elle soit capable d’être un mouvem<strong>en</strong>t et au-delà<br />
de son propre mouvem<strong>en</strong>t, une figure du mouvem<strong>en</strong>t, pour mettre les choses <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t,<br />
il y a quelque chose qui doit rester stable et vide, c’est le moyeu. Alors celui-là, on<br />
peut l’appeler l’ego. C’est très important. Il faut le vider de sa dim<strong>en</strong>sion égotique, pour<br />
qu’on puisse accéder à une dim<strong>en</strong>sion individuelle qui, finalem<strong>en</strong>t devi<strong>en</strong>t anonyme<br />
parce qu’elle est partagée, et à ce mom<strong>en</strong>t là, le sujet devi<strong>en</strong>t, il peut dev<strong>en</strong>ir la condition<br />
d’un sujet épique. Au s<strong>en</strong>s de l’épopée. Il peut avoir quelque chose à dire qui est<br />
commun, non pas dans le s<strong>en</strong>s du banal, mais qui peut être partagé. Le Moi <strong>en</strong> tant qu’il<br />
est une sorte de face à face <strong>en</strong> miroir, il est haïssable, et ça donne lieu à des…<br />
Thierry Fabre<br />
Un narcissisme contemporain ?<br />
R<strong>en</strong>aud Ego<br />
Voilà. Un narcissisme dont il ne sort pas forcém<strong>en</strong>t grand chose. Ou alors il faut être<br />
capable d’une introspection imaginante remarquable comme celle de Proust pour réinv<strong>en</strong>ter<br />
sa propre mémoire <strong>en</strong> <strong>en</strong> faisant un théâtre fantastique et mythomane, tel que le<br />
Moi est capable, à ce mom<strong>en</strong>t là, de dev<strong>en</strong>ir un théâtre collectif. Mais s’il s’agit de retrouver<br />
un ego <strong>en</strong> tant que petit soi, et bi<strong>en</strong> je crois qu’on ne trouve pas ce qu’on peut avoir<br />
<strong>en</strong> propre ou alors ça sera toujours quelque chose d’extrêmem<strong>en</strong>t infime.<br />
Thierry Fabre<br />
La quête d’un propre est effectivem<strong>en</strong>t un imm<strong>en</strong>se travail sur soi.<br />
R<strong>en</strong>aud Ego<br />
C’est un imm<strong>en</strong>se travail sur soi et je dirais que…<br />
Thierry Fabre<br />
C’est le travail de la création.<br />
R<strong>en</strong>aud Ego<br />
Oui. On a des matériaux qui sont communs après tout. Zad Moultaka travaille avec des<br />
notes qui sont communes à tous les musici<strong>en</strong>s. Simplem<strong>en</strong>t avec des notes communes<br />
à tous les musici<strong>en</strong>s, il va essayer de construire une phrase qui sera peut-être le nom propre<br />
d’une situation à laquelle il essaiera de r<strong>en</strong>dre compte. Moi avec des noms communs,<br />
si j’essaie de décrire une scène, même la plus banale, elle est singulière, mais je<br />
n’ai que des noms communs pour essayer de la dire. Si je veux dire ce qu’elle a <strong>en</strong> propre,<br />
et bi<strong>en</strong> avec ces noms communs, je vais faire un travail qui va me permettre d’essayer<br />
de dire ce qu’elle peut avoir <strong>en</strong> propre. Ça c’est un travail vers la dim<strong>en</strong>sion impersonnelle<br />
des choses. Mais non pas <strong>en</strong> tant qu’elles sont vides, mais <strong>en</strong> tant que leur s<strong>en</strong>s<br />
est ouvert et non pas clos <strong>en</strong> lui-même.<br />
Thierry Fabre<br />
C’est peut-être un des grands <strong>en</strong>jeux du travail d’écriture contemporaine. J’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais<br />
Jean-François Kahn qui disait une critique très vigoureuse sur le phénomène des blogs,<br />
<strong>en</strong> disant que c’est une écriture, non pas qui est <strong>en</strong> partage, mais d’un grand narcissisme,<br />
et d’un <strong>en</strong>fermem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> soi, pour soi, qui n’est pas une façon de se partager, mais de<br />
mettre <strong>en</strong> scène son ego au s<strong>en</strong>s d’égotisme.<br />
R<strong>en</strong>aud Ego<br />
Oui, c’est un peu le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t que ça donne et on n’a pas l’impression à ce mom<strong>en</strong>t là<br />
que ce sont des lieux comme des ronds qui tourn<strong>en</strong>t. Parce que quand je parle de la roue<br />
qui tourne, ça veut dire d’être exposé, comme ça, exposé au monde avec tout un corps<br />
et on regarde tout autour de soi. Que ce soit de regarder à l’intérieur d’une chambre, ou<br />
que ce soit un petit peu loin dans un pays, ou un petit peu plus loin dans ce qu’on va<br />
appeler un monde. Si cette figure du tour est importante, c’est que très souv<strong>en</strong>t par le<br />
biais du tour, des détours, on arrive à retrouver parfois ce qui est son propre héritage.<br />
Pour accéder à un passé, à un héritage, on est obligé de passer par un ailleurs. C’est une<br />
179