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Mise en page 1 - Théâtre Massalia

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L’œuvre de Anne Teresa de Keersmaker par Philippe Guisgand<br />

fois dans la période réc<strong>en</strong>te, qu’une musique a été composée, notamm<strong>en</strong>t par Thierry de<br />

Mey, à l’observation des danseurs. On retrouve des similitudes.<br />

[Extrait de Drumming]<br />

L’idée de ce solo c’est la phrase de base exposée par une seule danseuse. Vous avez une<br />

chose importante qui est que le mouvem<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>te toujours des flexions. Ces flexions<br />

prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t une forte analogie avec le geste du musici<strong>en</strong>, le geste percussif. « Drumming »<br />

est une composition faite par Steve Reich, <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>ant d’une résid<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> Afrique. Cette<br />

manière d’avoir toujours des flexions, d’un point de vue esthétique, montre cette<br />

analogie, cet arrimage très fort <strong>en</strong>tre la gestuelle, et la musique. Dans cette captation là,<br />

la musique est <strong>en</strong>registrée, mais « Drumming » a été souv<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tée live avec tous les<br />

musici<strong>en</strong>s, <strong>en</strong> arrière fond sur le plateau. Vous avez cette étrange alchimie <strong>en</strong>tre les<br />

percussions incessantes du percussionniste d’Ictus, et une gestuelle qui est souv<strong>en</strong>t très<br />

proche esthétiquem<strong>en</strong>t, qui est celle de la danseuse.<br />

Troisième grande caractéristique de ce style, ce qui n’est pas forcém<strong>en</strong>t propre à Rosas,<br />

c’est des danseurs créateurs. C’est vrai que tous les grands chorégraphes, et aujourd’hui,<br />

c’est dev<strong>en</strong>u pratiquem<strong>en</strong>t une règle, ont forgé leur écriture avec l’aide de danseurs parfois<br />

d’exception. C’est le cas avec Edouard Lock, avec Louise Lecavalier, danseurs qui<br />

ont aussi une forte personnalité. Keersmaeker ne fait pas exception à cette règle là. Cela<br />

s’affirmait déjà dans le titre tautologique « Rosas danst rosas ». Rosas affirme l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t<br />

des interprètes dans ce travail d’écriture. Il y a un élém<strong>en</strong>t important, c’est que<br />

Anne Teresa de Keersmaeker, toute grande chorégraphe qu’elle puisse paraître, n’est pas<br />

une danseuse d’exception. C’est quelqu’un qui, au sol se s<strong>en</strong>t très mal à l’aise. Elle le<br />

reconnaît elle-même, elle dit qu’elle danse comme un cube. Ça vous donne un peu une<br />

idée de sa célérité au sol. C’est la raison pour laquelle, pour pouvoir explorer de manière<br />

très dynamique le sol, elle a fait appel aux garçons. Le vocabulaire du sol dans un<br />

spectacle de Rosas, c’est très souv<strong>en</strong>t un vocabulaire qui vi<strong>en</strong>t des danseurs eux-mêmes.<br />

Autre élém<strong>en</strong>t intéressant, c’est ce cycle d’apparition/disparition de Keersmaeker sur<br />

scène <strong>en</strong> tant qu’interprète. A chaque fois qu’elle revi<strong>en</strong>t sur scène, c’est souv<strong>en</strong>t parce<br />

qu’arrive un questionnem<strong>en</strong>t, un point de basculem<strong>en</strong>t sur la forme de la danse. Si elle<br />

revi<strong>en</strong>t à « Toccata », après avoir disparu de la scène p<strong>en</strong>dant 7 ans, c’est précisém<strong>en</strong>t<br />

parce que le vocabulaire se teinte d’autre chose que de la danse. Il y a une autre manière<br />

de faire de la danse. Quand elle se fait filmer dans « Tippeke », et que « Tipekke », est<br />

réintroduit comme univers d’images dans le spectacle « Woud », c’est aussi pour avoir sa<br />

prés<strong>en</strong>ce à elle qui guide les danseurs sur scène. La réaffirmation de sa propre prés<strong>en</strong>ce<br />

intervi<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t à des périodes de questionnem<strong>en</strong>t où on s<strong>en</strong>t que le vocabulaire<br />

change ou va changer. C’est le cas <strong>en</strong>core très récemm<strong>en</strong>t avec « Wants », qui est le solo<br />

qui est écrit sur les musiques de Joan Baez. Cette alchimie <strong>en</strong>tre son vocabulaire à elle,<br />

le vocabulaire des danseurs, les conditions qu’elle crée pour générer du matériau chorégraphique,<br />

porte aussi la trace de son <strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t. Il ne faut pas cacher, j’ai dit tout à<br />

l’heure que son troisième projet qui était P.A.R.T.S a aujourd’hui 12 ans, et il est évid<strong>en</strong>t<br />

que la pédagogie P.A.R.T.S résonne très fort sur la manière qu’ont les danseurs de danser,<br />

et le répertoire qui est choisi. Keersmaeker a très peu d’icônes, ses icônes sont<br />

Forsythe, Pina Bausch et Trisha Brown, une grande partie du vocabulaire de P.A.R.T.S, des<br />

acquisitions techniques se fait à partir du répertoire. Soit parce que les professeurs invités<br />

sont des danseurs de ces compagnies, c’était le cas d’Elisabeth Corbett, soit, parce<br />

que disons, depuis une dizaine d’année, une grande partie des danseurs sont issus de ce<br />

réservoir P.A.R.T.S. Ils cré<strong>en</strong>t comme ça une espèce de conniv<strong>en</strong>ce corporelle, et c’est évid<strong>en</strong>t,<br />

une manière de danser. Il y a un style. Ce qui pose problème aux autres. Pour les<br />

autres étudiants qui sont issus de P.A.R.T.S, c’est Johanne Saunier qui me disait ça, c’est<br />

très difficile de rester <strong>en</strong> Belgique, parce que soit vous êtes trop « P.A.R.T.S », soit vous<br />

ne l’êtes pas assez. Si vous dites que vous avez dansé chez Rosas, ou que vous êtes de<br />

P.A.R.T.S, soit vous êtes trop Rosas, soit vous ne l’êtes pas assez. P<strong>en</strong>dant une dizaine<br />

d’années, ça a posé des problèmes aux g<strong>en</strong>s qui sortai<strong>en</strong>t<br />

de cette école et qui cherchai<strong>en</strong>t à percer,<br />

comme chorégraphes notamm<strong>en</strong>t.<br />

Enfin, dernier point qui est important et qui est souv<strong>en</strong>t<br />

« tarte à la crème » sur Keersmaeker, c’est l’idée<br />

que sa danse serait <strong>en</strong>tre, <strong>en</strong>core une fois, structure<br />

Sa danse serait <strong>en</strong>tre,<br />

<strong>en</strong>core une fois,<br />

structure et émotion.<br />

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