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Mise en page 1 - Théâtre Massalia

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Ecriture et notation musicales : L’écriture et l’espace - Confér<strong>en</strong>ce-concert de Nicolas Frize<br />

consistances, des ess<strong>en</strong>ces, qui m’ont permis d’écrire la musique. Elle était faite pour ces<br />

g<strong>en</strong>s qui avai<strong>en</strong>t élaboré ce travail théorique. P<strong>en</strong>dant les séminaires, les séances, on faisait<br />

déjà de la musique.<br />

Et c’était très intéressant de voir que, <strong>en</strong> fait, quand on débat, on débat face à face, et<br />

quand on fait de la musique, on se met dans la même direction, on regarde le chef, et on<br />

a une partition. C’est un mouvem<strong>en</strong>t de face à face, de travail <strong>en</strong> commun. Comme je le<br />

disais tout à l’heure, être <strong>en</strong>semble, c’est aller dans la même direction musicalem<strong>en</strong>t.<br />

Après, on repr<strong>en</strong>d sa chaise, on est face à face et on discute, puis on repr<strong>en</strong>d la répétition<br />

et on rediscute, c’est un exercice de travail collectif extrêmem<strong>en</strong>t intéressant.<br />

On se r<strong>en</strong>d compte que, finalem<strong>en</strong>t, on se bat pour des idées qui sont <strong>en</strong>tre nous, mais<br />

qui ne sont pas nous. On ne peut pas se confondre avec nos idées. On ne peut pas<br />

s’id<strong>en</strong>tifier à nos idées. On ne peut pas faire une casserole au cul de l’autre parce qu’il a<br />

les idées qu’il a. Finalem<strong>en</strong>t les idées, elles sont <strong>en</strong>tre nous. Elles sont au milieu de la<br />

table, elles sont ce qu’on apporte sur la table, ce qu’on croit, ce que l’on ne croit pas, ce<br />

que l’on pourrait s<strong>en</strong>tir, ce que l’on a <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du… mais c’est pas nous. Et du coup, il est<br />

plus facile, après, quand les idées sont devant nous, de se remettre <strong>en</strong>semble pour<br />

travailler, parce que finalem<strong>en</strong>t, les idées sont une sorte de mom<strong>en</strong>t qui nous est<br />

distinct, et la partition est le mom<strong>en</strong>t où nos corps sont <strong>en</strong>semble. Ça a donné un<br />

concert qui avait 4 parties. Une première partie où il y avait des lectures, où il y avait des<br />

amateurs du collectif qui lisai<strong>en</strong>t des textes de Camus, de Glissant, de Sartre, d’Aimé<br />

Césaire, de plein d’auteurs. En même temps, des textes étai<strong>en</strong>t projetés. L’idée était de<br />

faire un peu du Godard, c’est à dire de ne pas être trop donneurs de leçons, donc il y avait<br />

des tas de textes qui se superposai<strong>en</strong>t les uns aux autres et les g<strong>en</strong>s attrapai<strong>en</strong>t ce qu’ils<br />

voulai<strong>en</strong>t là-dedans. Et puis il y avait un livret, les g<strong>en</strong>s avai<strong>en</strong>t un texte sous la main.<br />

C’était une première partie où on t<strong>en</strong>dait la main à la réflexion. On était assis, et les<br />

lecteurs nous donnai<strong>en</strong>t des informations.<br />

Et puis dans un deuxième partie, les interprètes sont au milieu de la salle, debout, au<br />

milieu des g<strong>en</strong>s, au milieu du public. On ne sait pas qui chante, qui est instrum<strong>en</strong>tiste<br />

et qui est public. Petit à petit, il comm<strong>en</strong>ce à y avoir des sons, des g<strong>en</strong>s qui font des<br />

choses très basiques. On se demande si ce n’est pas quelqu’un du public qui se mouche<br />

ou qui se racle la gorge ! Petit à petit, on comm<strong>en</strong>ce à compr<strong>en</strong>dre qu’il y <strong>en</strong> a parmi nous<br />

qui font des choses bizarres. Ces g<strong>en</strong>s ont l’air de faire des choses <strong>en</strong>semble. Parfois dans<br />

la partition, je les regroupais. La notion de famille, de clan, le mom<strong>en</strong>t où on se met à<br />

deux, ça s’appelle le couple, puis on se met à trois, puis quatre. Certains appell<strong>en</strong>t cela<br />

la famille, d’autres le clan, la communauté. Et puis on a du mal à r<strong>en</strong>trer dans ces communautés,<br />

parfois, elles éclat<strong>en</strong>t et se refond<strong>en</strong>t dans des groupes etc.. Tous ces<br />

mouvem<strong>en</strong>ts un peu bizarres qui font que, finalem<strong>en</strong>t, on ne se mélange pas tant que ça.<br />

Cette musique était au milieu des g<strong>en</strong>s et on ne savait pas qui faisait quoi. Et de temps<br />

<strong>en</strong> temps, certains sont id<strong>en</strong>tifiés comme chanteur, trompettiste. Parfois on voit du<br />

public qui se laisse aller, qui ferme les yeux pour <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre tous ces sons au milieu de lui.<br />

Il y a des mélanges. En plus, comme les g<strong>en</strong>s avai<strong>en</strong>t un livret, on ne savait plus très bi<strong>en</strong><br />

qui avait la partition et qui ne l’avait pas. C’était la première partie.<br />

Deuxième partie, on partait dans une autre salle. C’étai<strong>en</strong>t des salles successives. J’avais<br />

imaginé un gradin comme une sorte de petite pyramide et tout le monde est assis, <strong>en</strong> se<br />

tournant le dos. Tout le monde se tourne le dos, ce qui est <strong>en</strong> gros la situation de la vie<br />

collective. Les chanteurs sont autour et se déplac<strong>en</strong>t. Donc quand vous avez un chanteur<br />

<strong>en</strong> face de vous, vous êtes cont<strong>en</strong>ts, c’est rassurant, vous le voyez. Vous vous faites une<br />

figure de lui. C’est ce qu’on appelle la désignation, la nomination. On se dit : c’est une<br />

femme, elle a un certain âge, elle est blanche, il semble que sa langue soit le français…<br />

On ne se r<strong>en</strong>d pas compte, mais très vite, on marque les g<strong>en</strong>s. A un mom<strong>en</strong>t donné, cette<br />

personne s’<strong>en</strong> va parce que les interprètes bougeai<strong>en</strong>t et se déplaçai<strong>en</strong>t. Cette personne<br />

s’<strong>en</strong> va, et comme on a <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du sa voix et qu’on sait qui elle est, on ne la fantasme pas,<br />

on la reconnaît même si on ne la voit plus parce qu’elle est passée derrière. Elle fait<br />

partie de notre mémoire et elle fait partie de nous-même si elle n’est plus avec nous.<br />

A l’inverse, les g<strong>en</strong>s qu’on a pas <strong>en</strong>core vus, qui sont restés dans notre dos longtemps,<br />

devant les autres, on est inquiets, on se demande qui c’est. On ne sait pas comm<strong>en</strong>t ils<br />

sont. On ne sait pas s’ils sont gros, petits, de quelle couleur ils sont… A un mom<strong>en</strong>t ils<br />

vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t devant nous, on reconnaît leur voix, et on se dit : « Mais celui là je ne l’ai <strong>en</strong>core<br />

pas vu, je ne sais pas où il est ». Donc, c’est tout l’exercice de la figuration et de la<br />

reconnaissance, du fantasme aussi. Les interprètes circul<strong>en</strong>t tout autour. D’autres sont<br />

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