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3 Les lois du mouvement<br />
3.1 Importance historique <strong>de</strong>s lois du mouvement<br />
Avant d’énoncer et <strong>de</strong> commenter les lois du mouvement <strong>de</strong> Newton, il est bon <strong>de</strong> souligner leur<br />
importance historique en rappelant rapi<strong>de</strong>ment les conceptions anciennes sur les causes du mouvement.<br />
La pensée <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> l’Antiquité et du Moyen âge était dominée par l’oeuvre d’Aristote<br />
(−384/ − 322), qui couvre tous les domaines d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la nature, <strong>de</strong> la logique à la zoologie. Une<br />
part importante <strong>de</strong> l’oeuvre d’Aristote porte sur le mouvement. Mais Aristote traite du mouvement<br />
comme il traite <strong>de</strong> la zoologie : par une observation soignée <strong>de</strong>s phénomènes, avec un certain sens<br />
<strong>de</strong> la classification et, surtout, <strong>de</strong> manière essentiellement qualitative. Il distingue trois types <strong>de</strong><br />
mouvement : le mouvement naturel, le mouvement violent et le mouvement volontaire.<br />
Le mouvement naturel se produit lorsqu’un objet tend à rejoindre sa place naturelle dans l’ordre<br />
<strong>de</strong>s choses. Les anciens distinguaient généralement quatre éléments : la terre, l’eau, l’air et le feu.<br />
À chaque élément on associait une sphère et les sphères <strong>de</strong>s quatre éléments étaient imbriquées les<br />
unes dans les autres dans l’ordre ci-haut, la terre étant la plus intérieure. Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> la sphère du<br />
feu s’étendaient les sphères célestes, associées aux différents astres. Ainsi, l’explication qu’Aristote<br />
donne à la chute d’une pierre est que celle-ci tend naturellement à rejoindre la sphère <strong>de</strong> l’élément<br />
terre. La même explication vaut pour l’élévation dans les airs d’une flamme et l’écoulement <strong>de</strong><br />
l’eau. D’autre part, Aristote affirme qu’une pierre B, <strong>de</strong>ux fois plus lour<strong>de</strong> qu’une autre pierre<br />
A, met <strong>de</strong>ux fois moins <strong>de</strong> temps que A à tomber si on les relâche simultanément d’une certaine<br />
hauteur.<br />
Par contre, le mouvement violent est essentiellement artificiel et temporaire. Une charette qu’on<br />
tire subit un mouvement violent. L’état naturel <strong>de</strong>s objets terrestres étant le repos, une force est<br />
nécessaire pour qu’un objet puisse se déplacer, même à vitesse constante. On a réalisé assez tôt que<br />
ce type d’argument explique assez mal le mouvement d’une flèche qu’un archer décoche : quelle<br />
est donc la force qui fait avancer la flèche dans son vol, alors qu’elle a perdu contact avec la cor<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> l’arc? Les aristotéliciens soutiennent que l’air fendu par la flèche effectue un retour par <strong>de</strong>rrière<br />
et pousse constamment la flèche vers l’avant, jusqu’à ce qu’elle s’arrête et tombe par mouvement<br />
naturel. Certains penseurs médiévaux ont fortement critiqué cette explication, en ajoutant que la<br />
flèche recevait une certaine qualité appelée impetus (élan, en français) lors <strong>de</strong> son lancement et<br />
qu’elle épuisait progressivement cet impetus. La notion d’impetus est proche <strong>de</strong> notre notion <strong>de</strong><br />
quantité <strong>de</strong> mouvement, mais il lui manque une définition précise, quantitative.<br />
Quant au mouvement volontaire, il est le fruit <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong>s êtres animés : un animal qui se<br />
déplace, essentiellement. On voit à quel point la classification aristotélicienne du mouvement est<br />
superficielle et peu fécon<strong>de</strong> en explications véritables.<br />
Enfin, soulignons que les anciens, suivant Aristote, traçaient une démarcation claire entre la<br />
physique terrestre et la physique céleste : le mouvement naturel <strong>de</strong>s astres était circulaire et uniforme,<br />
même si plus d’un cercle était nécessaire pour décrire le mouvement d’un astre donné.<br />
Les objets célestes étaient réputés incorruptibles et éternels, alors que les objets terrestres (plus<br />
précisément, ceux du mon<strong>de</strong> dit sublunaire) étaient susceptibles <strong>de</strong> corruption, <strong>de</strong> changements.<br />
Résumons ainsi les principales caractéristiques <strong>de</strong> la physique aristotélicienne :<br />
1. La mouvement est décrit <strong>de</strong> manière entièrement qualitative, sans faire usage <strong>de</strong>s mathématiques.<br />
Ainsi, le mouvement est régi par <strong>de</strong>s principes vagues et non par <strong>de</strong>s lois physique précises.<br />
2. Le mon<strong>de</strong> sublunaire et le mon<strong>de</strong> céleste sont <strong>de</strong> natures très différentes.