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Psychologie de la manipulation et de la soumission

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68 PSYCHOLOGIE DE LA MANIPULATION ET DE LA SOUMISSION<br />

naturelles. Si l’on pousse un tel raisonnement dans ses r<strong>et</strong>ranchements, le<br />

<strong>la</strong>boratoire perm<strong>et</strong>trait d’exprimer un registre comportemental qui n’existerait<br />

que dans ce contexte. Ailleurs, notamment en condition naturelle, c<strong>et</strong><br />

eff<strong>et</strong> d’influence <strong>de</strong> l’autorité ne s’observerait pas à un tel niveau. Si<br />

l’histoire est là pour nous faire douter <strong>de</strong> <strong>la</strong> pertinence d’une telle argumentation,<br />

elle n’en constitue pas pour autant une preuve expérimentale. Pour c<strong>et</strong>te<br />

raison, <strong>de</strong>s chercheurs ont tenté d’évaluer l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>soumission</strong> à l’autorité<br />

en situation naturelle, dans un contexte habituel pour les suj<strong>et</strong>s.<br />

La plus marquante <strong>de</strong> toute est sans aucun doute <strong>la</strong> recherche menée par<br />

Hofling, Brotzman, Dalrymphe, Graves <strong>et</strong> Pierce en 1966 notamment en<br />

raison <strong>de</strong> <strong>la</strong> caractéristique <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s utilisés (<strong>de</strong>s infirmières) <strong>et</strong> du lieu dans<br />

lequel leur comportement <strong>de</strong> <strong>soumission</strong> a été testé (l’hôpital). Il arrive<br />

parfois que le statut <strong>de</strong>s infirmières soit contesté par le comportement <strong>de</strong>s<br />

mé<strong>de</strong>cins. C’est le cas lorsque le mé<strong>de</strong>cin viole les règles d’une procédure<br />

dont les infirmières ont habituellement <strong>la</strong> charge ou lorsqu’il leur ordonne <strong>de</strong><br />

procé<strong>de</strong>r à quelque chose qui contrevient à leurs principes professionnels.<br />

On peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si une infirmière obéira à l’injonction <strong>de</strong> donner un<br />

médicament à un ma<strong>la</strong><strong>de</strong> lorsque c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> émane d’un inconnu qui lui<br />

téléphone en se présentant comme un mé<strong>de</strong>cin sachant que : 1) <strong>la</strong> personne<br />

est étrangère à l’infirmière, 2) <strong>la</strong> procédure <strong>de</strong> prescription par téléphone<br />

contrevient aux règles <strong>de</strong> prescription à l’hôpital, 3) le médicament prescrit<br />

n’appartient pas à <strong>la</strong> liste <strong>de</strong> médicaments autorisés dans le service, enfin<br />

4) <strong>la</strong> dose prescrite est, sans ambiguïté, excessive. Afin <strong>de</strong> tester expérimentalement<br />

<strong>la</strong> réaction <strong>de</strong>s infirmières, Hofling <strong>et</strong> ses col<strong>la</strong>borateurs ont<br />

imaginé <strong>et</strong> mis en p<strong>la</strong>ce <strong>la</strong> procédure suivante menée auprès <strong>de</strong> trentequatre<br />

infirmières d’hôpitaux publics <strong>et</strong> privés américains.<br />

En condition expérimentale, <strong>de</strong>s boîtes <strong>de</strong> médicaments étaient p<strong>la</strong>cées<br />

dans l’armoire à pharmacie <strong>de</strong> différents services <strong>et</strong> les indications suivantes<br />

étaient portées sur ces boîtes : « Astroten, capsules <strong>de</strong> 5 mg, dosage ordinaire<br />

5 mg, dose journalière maximale 10 mg ». À l’ai<strong>de</strong> d’un enregistrement,<br />

l’expérimentateur téléphonait au suj<strong>et</strong> (l’infirmière <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>) <strong>et</strong> se<br />

présentait comme un mé<strong>de</strong>cin (« Je suis le Dr Hanford » : nom totalement<br />

inconnu dans le service) qui disait venir visiter un patient du service (un<br />

patient véritablement en soin dans le service). Ensuite, l’expérimentateur<br />

<strong>de</strong>mandait à l’infirmière d’aller vérifier dans l’armoire à pharmacie si le<br />

médicament (Astroten) avait été reçu. Lorsque l’infirmière revenait pour<br />

confirmer <strong>la</strong> présence du médicament, l’expérimentateur lui <strong>de</strong>mandait<br />

d’administrer au patient 20 mg (le double <strong>de</strong> <strong>la</strong> dose maximale autorisée) <strong>et</strong><br />

disait qu’il signerait <strong>la</strong> prescription ultérieurement mais qu’il fal<strong>la</strong>it que le<br />

ma<strong>la</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> reçoive pour que ce<strong>la</strong> commence à faire <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> lorsqu’il arriverait<br />

dans dix minutes. L’expérimentateur remerciait ensuite l’infirmière <strong>et</strong><br />

raccrochait.

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