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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 104<br />

« En présence des crises constantes, les économistes parlent, les uns de surpro<strong>du</strong>ction,<br />

les autres de surpopulation. La surpro<strong>du</strong>ction, cause de notre misère ? Surpro<strong>du</strong>ction<br />

en vérité quand nous, les pro<strong>du</strong>cteurs, à moitié morts de faim, nous ne<br />

pouvons avec notre travail obtenir rien qui ressemble à une quantité suffisante de pro<strong>du</strong>ction.<br />

Jamais à aucune autre époque, dans aucun autre pays que le nôtre, l'abondance<br />

n'a été invoquée comme une cause de misère. Dieu bon, où est-elle, cette abondance<br />

? Abondance de vivres ! demandez au cultivateur ou à l'<strong>ouvrier</strong> si c'est leur<br />

avis : leur corps émacié est la meilleure réponse. Abondance de vêtements ! la nudité,<br />

le frisson, l'asthme, les refroidissements et les rhumatismes <strong>du</strong> peuple sont la preuve<br />

de son abondance de vêtements. Nos seigneurs et maîtres nous disent que nous pro<strong>du</strong>isons<br />

trop. Très bien ! alors nous cesserons de pro<strong>du</strong>ire pendant un mois et nous<br />

mettrons ainsi en pratique la théorie de nos seigneurs et maîtres. »<br />

En mettant en pratique la théorie de la surpro<strong>du</strong>ction et en cessant de pro<strong>du</strong>ire<br />

pendant un mois, les classes ouvrières montreront que d'elles dépendent toute pro<strong>du</strong>ction<br />

et toute richesse, que toute vie sociale s'arrête par l'arrêt même de leur travail.<br />

Socialisme <strong>ouvrier</strong>, union internationale des classes laborieuses, politique de<br />

classe, mais non de lutte de classes, possibilité d'alliance avec les partis bourgeois,<br />

tels sont les principes qui ont inspiré la formation de la Working Men's Association,<br />

mais qui ne suffisent pas à définir le Chartisme. Ces lignes générales d'une doctrine et<br />

d'une tactique sont complétées, dès janvier 1832, par l'idée de grève générale.<br />

Le Chartisme est, avant tout, le <strong>mouvement</strong> des masses. Il représente un des premiers<br />

élans des innombrables. Mais il n'est pas seulement un <strong>mouvement</strong> anonyme :<br />

des indivi<strong>du</strong>alités apparaissent en relief. L'évolution <strong>du</strong> Chartisme, comme son essor,<br />

ne peut s'expliquer sans les génies réunis autour de son berceau et qui ont présidé à<br />

ses destinées.<br />

Ces visages humains précisent et incarnent les doctrines qui se sont mêlées au<br />

Chartisme. Mais, par delà les digues de l'idéologie, des courants ont entraîné ce <strong>mouvement</strong><br />

de masses, comme un fleuve ; son cours a été si impétueux que, franchissant<br />

les obstacles que les circonstances adverses ou la perversité des hommes mettaient sur<br />

sa route, il a parfois tout emporté, même les idéologies. Sa force, le Chartisme la doit<br />

à cet élan des masses ouvrières, qui ont fait pour lui leur première grande expérience<br />

historique 41 .<br />

41 ÉDOUARD DOLLÉANS, Le Chartisme (<strong>1830</strong>--1848), 2 vol., 1912-1913, Floury éd.

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