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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 153<br />

Tristan qu'elle-même et ils avaient su lui rendre hommage en lui disant, comme Belnot<br />

58 , qui la remerciait « d'avoir électrisé l'âme <strong>du</strong> Comité », ou comme Achille François,<br />

« de la lumière qu'elle faisait surgir ». Mais, toujours amical, Achille François<br />

ajoutait : « J'adopte vos idées, je les ai analysées, et je vois que le plan est vaste et<br />

puissant, mais pour y arriver, je vous dirai toujours ce ne sera que progressivement et<br />

par la voie des <strong>ouvrier</strong>s eux-mêmes. »<br />

Gosset, Achille François, Pierre Moreau, Belnot avaient compris Flora Tristan, et<br />

ils lui avaient ren<strong>du</strong> justice. En dépit des malenten<strong>du</strong>s et des froissements, un lien<br />

fraternel existe, à cette date de l'histoire ouvrière, entre Flora Tristan et ces hommes<br />

de grand bon sens et de grand cœur. Si son orgueil les avait cabrés, ils lui étaient reconnaissants<br />

de sa foi. L'Union ouvrière paraît le 1 er juin 1843. Flora Tristan l'envoie<br />

aux Sociétés de Compagnonnage. Elle quitte Paris, au cours de 1843, pour aller visiter<br />

ses correspondants de province : la maladie interrompt son voyage, elle revient à Paris,<br />

puis repart, le 12 avril 1844, pour accomplir son tour de, France. La police la<br />

poursuit à Lyon, à Montpellier, où on l'accuse d'avoir provoqué une grève. Le 26<br />

septembre, elle arrive à Bordeaux épuisée, malade, et elle meurt en répétant : « les<br />

idées germent et fructifient, mais elles ne meurent pas ».<br />

Dans son Union ouvrière, Flora Tristan avait tracé une esquisse de l'Internationale<br />

:<br />

« L'Union ouvrière, procédant au nom de l'Unité universelle, ne doit faire aucune<br />

distinction entre les nationaux et les <strong>ouvrier</strong>s et ouvrières appartenant à n'importe<br />

quelle nation de la terre. Ainsi pour tout indivi<strong>du</strong>, dit étranger, les bénéfices de<br />

l'Union seront absolument les mêmes que pour les Français. L'Union ouvrière devra<br />

établir dans les principales villes d'Angleterre, d'Italie, d'Allemagne, en un mot dans<br />

les capitales d'Europe, des Comités de correspondance. »<br />

Flora Tristan avait en vain fait appel à Lamartine et à Béranger, en leur demandant<br />

un chant pour mettre en tête de son livre. Leur silence a permis que L'Union ouvrière<br />

s'achève par un poème de l'<strong>ouvrier</strong> maçon Poncy 59 :<br />

« Mes frères, il est temps que les haines s'oublient ;<br />

Que sous un seul drapeau les peuples se rallient !<br />

La Grande Liberté que l'humanité rêve,<br />

Comme un nouveau soleil, radieux, se lève<br />

Sur l'horizon de l'Avenir.<br />

O mes frères, suivons ces sublimes modèles,<br />

58 Belnot à Flora Tristan : « Croyez-le bien, madame, nous avons compris, nous avons trouvé votre<br />

idée belle, grandiose. Quand vous êtes venue nous trouver, pensiez-vous trouver parmi nous des<br />

claqueurs pour applaudir en aveugles à votre ouvrage ?... Néanmoins, malgré votre rupture avec le<br />

Comité, il ne vous en remercie pas moins d'avoir électrisé son âme par une pensée qui doit un jour<br />

assurer le bonheur <strong>du</strong> genre humain. »<br />

59 Charles Poncy écrit ce poème à Toulon, tandis qu'il travaille à trois lieues de la ville « où il vit loin<br />

de toute littérature, de toute politique, de toute actualité avec quelques Génois, le ciel et la mer ».<br />

CHARLES PONCY, Marines, Paris, Lavigne, 1842; Le Chantier, Perrotin, 1844 ; La chanson de chaque<br />

métier (1850).

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