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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 272<br />

sion de démêlés soulevés à propos de la Caisse de secours. La Caisse de secours est<br />

gérée par la direction et alimentée par une retenue de 2 _ % sur le traitement de tout<br />

le personnel de l'établissement. Le 7 janvier, M. Schneider adresse à ses chefs de service<br />

une circulaire confirmant la décision qu'il a prise de laisser aux sociétaires euxmêmes<br />

la gestion de la Caisse. Aussitôt, les <strong>ouvrier</strong>s nomment des délégués pour régulariser<br />

la situation. Ceux-ci se rendent auprès de M. Schneider pour le remercier.<br />

M. Schneider les reçoit froidement et leur dit : « Prenez garde, vous faites de l'opposition<br />

polie, mais ce n'est pas moins de l'opposition, et je n'aime pas l'opposition. »<br />

Les <strong>ouvrier</strong>s votent sur la question de la reddition de la Caisse : 1931 oui contre 536<br />

non : « Le vote était significatif, et M. Schneider le comprit si bien qu'il entra dans<br />

une violente colère quand il en apprit le résultat. 126 »<br />

Les <strong>ouvrier</strong>s de l'atelier d'ajustage nomment à l'unanimité, pour les représenter, le<br />

mécanicien ajusteur Assi qui est choisi par les autres délégués comme président de la<br />

délégation. Assi demande à Ernest Picard et à Jules Favre des conseils juridiques pour<br />

organiser la Caisse de secours en société de secours mutuels, conformément au décret<br />

de 1852.<br />

Le 19 janvier, en se rendant à son atelier, Assi est congédié devant ses camarades.<br />

En signe de protestation, les <strong>ouvrier</strong>s sortent avec lui. Les délégués se rendent en députation<br />

auprès de M. Schneider. Celui-ci les reçoit debout, ayant à sa droite son fils,<br />

à sa gauche, l'ingénieur en chef. Comme Assi prononce le mot « Caisse de secours »,<br />

M. Schneider l'interrompt :<br />

« Je ne veux pas qu'on me dicte des lois ; je n'en ai jamais subi, et je suis trop<br />

vieux pour commencer. En ce moment, sous l'influence de la pression, je ne puis délibérer<br />

avec vous. Je n'ai rien à discuter tant que les <strong>ouvrier</strong>s n'auront pas repris leurs<br />

travaux. Je verrai ce que j'aurai à faire quand je le jugerai nécessaire et ferai rouvrir<br />

les portes de l'usine. Alors, je serai en force. Si cela fait plaisir aux <strong>ouvrier</strong>s, ils pourront<br />

casser quelques machines, je ne leur en voudrai pas davantage pour cela. Je suis<br />

libre d'employer qui je voudrai dans mes ateliers ou usines. À la reprise des travaux,<br />

un premier triage sera fait parmi les <strong>ouvrier</strong>s. Si ce n'étaient les femmes et les enfants<br />

auxquels l'abstention de travail prend 40 000 francs par jour, il me serait égal de fermer<br />

les portes de l'usine pendant un mois ; si les <strong>ouvrier</strong>s le veulent, je suis tout disposé<br />

à le faire ; ce matin, on a rallumé une machine, et une demi-heure après, j'ai<br />

donné l'ordre de l'éteindre ; je ne veux pas, pour quelques <strong>ouvrier</strong>s partis de bonne<br />

volonté, rouvrir mes ateliers ; j'aimerais mieux voir éteindre tous les hauts fourneaux<br />

que de céder à la pression, et mon parti est pris pour les pertes de l'administration. »<br />

M. Schneider temporisait, ne disant pas qu'il avait télégraphié dans toutes les directions<br />

et que 4 000 hommes de troupe se dirigeaient vers le Creusot.<br />

*<br />

* *<br />

126<br />

Plaidoirie de l'avocat Léon Bigot, Troisième procès de l'Association Internationale, p. 145-159.<br />

Paris, A. Le Chevalier, juillet 1870.

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