Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871
Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871
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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 238<br />
les tristes événements dont l'opinion publique a été instruite. Dans cette situation l'Association<br />
Internationale croit devoir se prononcer et appeler l'attention des <strong>ouvrier</strong>s de<br />
tous les pays en faisant les déclarations suivantes :<br />
« L'emploi de la machine dans l'in<strong>du</strong>strie soulève un problème économique dont<br />
la solution prochaine s'impose impérieusement. Nous, travailleurs, nous reconnaissons<br />
en principe le droit des <strong>ouvrier</strong>s à une augmentation proportionnelle alors que, par un<br />
nouvel outillage, une, pro<strong>du</strong>ction plus considérable leur est imposée.<br />
« En France, pays <strong>du</strong> suffrage universel et de l'égalité, l'<strong>ouvrier</strong> est encore citoyen<br />
lorsqu'il a franchi la porte de l'atelier et de la fabrique. Les règlements imposés aux<br />
fileurs sont faits pour des serfs et non pour des hommes libres ; ils portent non seulement<br />
atteinte à la dignité, mais encore à l'existence <strong>du</strong> travailleur, puisque le chiffre<br />
des amendes peut supprimer et dépasser le taux <strong>du</strong> salaire.<br />
« Dans un pareil débat, alors qu'aucune violence n'avait été commise et que la<br />
grève commençait par l'abandon des ateliers, l'intervention de la gendarmerie n'a pu<br />
qu'irriter les <strong>ouvrier</strong>s qui croyaient y voir une pression et une menace.<br />
« Ouvriers de Roubaix,<br />
« Quels que soient vos justes griefs, rien ne peut justifier les actes de destruction<br />
dont vous vous êtes ren<strong>du</strong>s coupables. Songez que la machine, instrument de travail,<br />
doit vous être sacrée ; songez que de pareilles violences compromettent votre cause et<br />
celle de tous les travailleurs. Songez que vous venez de fournir des armes aux adversaires<br />
de la liberté et aux calomniateurs <strong>du</strong> peuple.<br />
« La grève continue, de nouvelles arrestations ont été faites, nous rappelons à tous<br />
les membres de l'Association Internationale des Travailleurs qu'il y a en ce moment à<br />
Roubaix des frères qui souffrent. Que si, parmi eux, des hommes un moment égarés<br />
se sont ren<strong>du</strong>s coupables de violence, que nous réprouvons, il y a entre eux et nous<br />
solidarité d'intérêts et de misère ; au fond <strong>du</strong> débat, il y a aussi de justes griefs que les<br />
fabricants doivent faire disparaître. Il y a enfin des familles sans chefs, que chacun de<br />
nous vienne leur apporter son appui matériel et moral. »<br />
En 1865, à la suite d'une grève grâce à laquelle les bronziers avaient obtenu la ré<strong>du</strong>ction<br />
de la journée de travail de 11 à 10 heures, ils avaient créé la Société de crédit<br />
mutuel et de solidarité des <strong>ouvrier</strong>s <strong>du</strong> Bronze, qui comprend bientôt 5 000 membres.<br />
En face d'elle, une Association de Fabricants <strong>du</strong> Bronze s'organise pour assurer l'indépendance<br />
et la liberté <strong>du</strong> travail. En février 1867, les fabricants <strong>du</strong> bronze s'engagent<br />
à souscrire un capital de garantie afin d'assurer <strong>du</strong> travail et une indemnité journalière<br />
à tous les <strong>ouvrier</strong>s qui déclareraient vouloir rester indépendants. 95<br />
Aussitôt, Barbedienne donne l'ordre à vingt-deux <strong>ouvrier</strong>s ragréeurs de renoncer à<br />
leur participation à la Société de crédit mutuel. Le reste <strong>du</strong> personnel fait cause com-<br />
95<br />
Société <strong>du</strong> Bronze : Historique de la Grève de 1867, Chambre syndicale des <strong>ouvrier</strong>s <strong>du</strong> Bronze,<br />
Le Courrier français. 24 mars 1867.