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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 33<br />

conseil central, « le Monstre à trois têtes », pourvu d'un droit de réglementation et de<br />

contrôle très éten<strong>du</strong>. La nouvelle loi interdit les secours à domicile et en argent donnés<br />

aux indigents valides, qui doivent tous désormais subir la discipline <strong>du</strong> workhouse.<br />

La réaction provoquée contre la nouvelle loi n'est pas seulement sentimentale. La<br />

loi de 1834 facilite l'exode de la population des comtés ruraux vers les villes de fabriques,<br />

et, par suite, la concurrence que font au prolétariat in<strong>du</strong>striel ces nouveaux venus,<br />

entraînant par leur présence des salaires plus bas et plus instables.<br />

Le Bill de 1832 installe au pouvoir la bourgeoisie ; celle-ci s'en sert aussitôt pour<br />

édicter une législation de classe. La loi de 1834 est la première grande mesure adoptée<br />

par la nouvelle Chambre en faveur des in<strong>du</strong>striels. La nouvelle loi fournissait aux<br />

« Lords <strong>du</strong> coton et de la boutique », dont les représentants étaient les maîtres au Parlement,<br />

une main-d’œuvre à bon marché, une main-d’œuvre soumise, puisque les indigents<br />

pauvres préféraient n'importe quel salaire à l'entrée dans les Bastilles des Pauvres.<br />

La nouvelle Loi des Pauvres blesse profondément les masses ouvrières. La<br />

concurrence dépressive des émigrés ruraux est considérée comme l'effet de la seule<br />

loi de 1834 ; l'organisation des workhouses froisse les sentiments populaires : les indigents<br />

valides y sont astreints à un régime de prison, séparés de leur femme et de<br />

leurs enfants.<br />

Dès les débuts <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, les réformateurs expriment les colères violentes<br />

que soulève la nouvelle loi. Sur ce point, ils voient se joindre à eux des conservateurs<br />

sociaux que leur indignation contre la nouvelle loi rapproche des Chartistes.<br />

Les torys Richard Oastler et Stephens sont les interprètes passionnés de l'émotion<br />

provoquée par la Loi des Pauvres.<br />

Conservateurs sociaux comme démocrates, radicaux et socialistes, entreprennent<br />

contre la loi une campagne ardente. Dans une lettre à Fielden, James Turner dénonce<br />

les mobiles de la loi<br />

« Si la population <strong>du</strong> Nord supporte seulement l'intro<strong>du</strong>ction de ce système infernal,<br />

il sera impossible d'empêcher les salaires de baisser. Les <strong>ouvrier</strong>s, vivant sous ce<br />

système, n'auront d'autre alternative que d'accepter le salaire offert par les employeurs<br />

Un très respectable tanneur me disait qu'il se faisait fort, si sa conscience le lui permettait,<br />

de faire exécuter son ouvrage pour 6 shillings par semaine. »<br />

La dépression des salaires, voilà la raison d'être cachée pour laquelle les capitalistes<br />

in<strong>du</strong>striels, maîtres <strong>du</strong> Parlement, ont fait voter la loi de 1834.<br />

La loi de 1834 a pour but de procurer aux in<strong>du</strong>striels de la main d'œuvre à bon<br />

marché, en créant par la venue des indigents valides sur le marché <strong>du</strong> travail une<br />

concurrence artificielle qui déprime les salaires. La loi est injuste dans son principe<br />

parce qu'elle porte atteinte à un droit traditionnel. Oastler, Stephens, Fielden, les leaders<br />

chartistes et les <strong>ouvrier</strong>s sont d'accord sur ce point : l'assistance est un droit. Les<br />

riches sont les gardiens de ce droit des pauvres ; en supprimant l'ancien système d'as-

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