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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 304<br />

che ; le lundi, il est déjà parti pour Paris : « Les apôtres de la conciliation ne méritent<br />

qu'une fin de non recevoir. »<br />

Dès les premières hostilités, dès le 2 avril, les troupes versaillaises fusillent les fédérés<br />

faits prisonniers. La Commune s'émeut et, le 5 avril, elle publie un décret par<br />

lequel elle espère protéger les soldats fédérés « contre ceux qui méconnaissaient les<br />

conditions habituelles de la guerre entre les peuples civilisés ».<br />

Les arrestations faites à la suite de ce décret ont pour effet, sinon d'arrêter les sévices<br />

subis par les fédérés prisonniers, <strong>du</strong> moins les exécutions sommaires. Les otages<br />

restent détenus à Mazas et à la Roquette pendant toute la Commune jusqu'au 24 mai.<br />

Pendant ces six semaines, Paris offre à Thiers d'échanger les otages contre le seul<br />

Blanqui.<br />

Dans les notes confiées par lui à Edmond de Pressensé 155 , Me Rousse, l'avocat<br />

défenseur des otages, raconte qu'il a vu en avril Raoul Rigault, qui lui a fait cette<br />

confidence : « Puisque nous sommes seuls, je vous dirai que nous avons commencé<br />

des négociations avec Versailles pour un échange de prisonniers et j'espère que nous y<br />

arriverons. »<br />

L'échange des otages, telle est l'intention constante de la Commue, qui emploie<br />

toutes les voies pour y arriver. L'archevêque de Paris écrit une lettre à Thiers et lui<br />

parle de l'échange des otages : celui-ci ne répond pas. Flotte parle à Thiers de<br />

l'échange et, pour l'y décider, il insiste sur le danger que peut courir l'archevêque.<br />

Thiers reste silencieux. On décide alors d'envoyer à Versailles le vicaire général Lagarde<br />

; celui-ci remet à Thiers une lettre où l'archevêque lui demande de consentir à<br />

l'échange... Thiers répond non à cette seconde lettre, mais à la première : « Les faits<br />

sur lesquels vous appelez mon attention sont absolument faux, et je suis véritablement<br />

surpris qu'un prélat aussi éclairé que vous ait pu y croire. Jamais nos soldats n'ont<br />

fusillé des prisonniers ni cherché à achever des blessés... » L'abbé Lagarde reste à<br />

Versailles 156 . Thiers le retient, gagne <strong>du</strong> temps. Il attend que les événements provoquent<br />

le crime souhaité par lui ; il compte s'en servir comme d'une justification. Dans<br />

le tumulte et le désespoir, le 24 mai, six des otages seront exécutés, payant de leur vie<br />

les massacres sauvages auxquels les Versaillais se livrent sur les plus innocentes victimes<br />

157 .<br />

155<br />

EDMOND DE PRESSENSÉ, Revue des Deux Mondes, 15 juin <strong>1871</strong>. « Le 18 mars, Paris sous la Commune.<br />

»<br />

156<br />

COMTE D’HÉRISSON, Op. cit., p. 218 et suiv. « L'abbé Lagarde fut chargé par l'archevêque d'aller à<br />

Versailles négocier un échange... Il faut se demander d'abord pourquoi cette mission échoua. La<br />

réponse sera bien simple. Elle échoua parce que M. Thiers ne voulut pas admettre même l'idée de<br />

négociation quelconque avec les insurgés… Dans ce refus éclate aussi la férocité de l'âme bourgeoise<br />

et basse qui animait le vainqueur de la Commune. »<br />

157<br />

Le National dira « assez d'exécutions, assez de sang, assez de victimes ». MAURICE GARÇON, La<br />

Justice contemporaine : « Pendant toute une semaine, Paris fut le théâtre d'une abominable parodie<br />

de la justice qui facilita toutes les lâchetés et autorisa toutes les cruautés. »

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