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Histoire du mouvement ouvrier Tome I : 1830-1871

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Édouard Dolléans, <strong>Histoire</strong> <strong>du</strong> <strong>mouvement</strong> <strong>ouvrier</strong>, <strong>Tome</strong> I : <strong>1830</strong>-<strong>1871</strong> (1948) 243<br />

moire au Congrès de Genève, sauf Bourdon et Varlin, les autres délégués parisiens<br />

s'étaient prononcés contre l'instruction gratuite et obligatoire. Ils craignaient que<br />

l'é<strong>du</strong>cation par l'État ne portât atteinte à l'indépendance de la famille et à l'autorité<br />

paternelle ; ils partageaient la défiance de Proudhon à l'égard de l'État, craignant la<br />

formation d'hommes en série, de ces « automates ».<br />

La formation de l'é<strong>du</strong>cation revient à la mère :<br />

« Au nom de la liberté de conscience, au nom de l'initiative indivi<strong>du</strong>elle, au nom<br />

de la liberté de la mère, laissez-nous arracher à l'atelier qui la démoralise, et la tue,<br />

cette femme que vous rêvez libre, cette femme fatalement condamnée, par l'abus d'un<br />

travail pour lequel elle n'était pas constituée, à une existence sans joie et sans but. La<br />

femme a pour but essentiel d'être une mère de famille, la femme doit rester au foyer,<br />

le travail doit lui être interdit. A la mère, la fonction d'élever l'enfant, de préparer à<br />

cette é<strong>du</strong>cation mâle et libre qui, seule, peut faire un homme. La famille, ainsi reconstituée<br />

grâce à une réforme radicale des mœurs, à une plus juste répartition des pro<strong>du</strong>its<br />

<strong>du</strong> travail, suffira, croyons-nous, à faire des citoyens, en dehors de l'influence de<br />

l'État et de toute réglementation. »<br />

Tel était l'idéal de ces premiers internationaux proudhoniens. Toute différente était<br />

la conception de ceux que Varlin appelle des « communistes antiautoritaires ». Ils<br />

réclament l'instruction obligatoire et gratuite pour tous, « car la somme d'avance que<br />

nécessite une é<strong>du</strong>cation capable de développer toutes les facultés de l'enfant et de le<br />

mettre au courant de la science et de l'in<strong>du</strong>strie, étant considérable, il n'est pas indifférent<br />

de rechercher par qui elle sera fournie ». Il importe que tous les enfants soient<br />

assurés de recevoir une é<strong>du</strong>cation complète, afin qu'aucun ne commence la vie dans<br />

des conditions d'infériorité. Or c'est ce qui se pro<strong>du</strong>ira fatalement si c'est à la famille<br />

qu'incombe la charge de l'é<strong>du</strong>cation : selon que la famille compte plus ou moins d'enfants,<br />

elle dispose de ressources plus ou moins grandes... D'où « inégalité pour les<br />

enfants dans les résultats, inégalité des charges pour les familles, donc pas de justice<br />

». Varlin et Bourdon ont raison lorsqu'ils concluent :<br />

« Que la société prenne l'é<strong>du</strong>cation à charge, et les inégalités cessent, la charité<br />

disparaît. L'enseignement devient un droit égal pour tous, payé par tous les citoyens,<br />

non plus en raison <strong>du</strong> nombre de leurs enfants, mais en raison de leur capacité contributive...<br />

Mais quand nous demandons que l'enseignement soit à la charge de la société,<br />

nous entendons une société vraiment démocratique dans laquelle la direction de<br />

l'enseignement serait à la volonté de tous.<br />

« Dans notre esprit, l'administration centrale, après avoir formulé un programme<br />

d'étude comprenant seulement les notions essentielles et d'utilité générale, laisserait<br />

aux communes le soin d'y ajouter ce qui leur semblerait bon et utile par rapport aux<br />

lieux, mœurs et in<strong>du</strong>stries <strong>du</strong> pays, et de choisir leurs professeurs, ouvrir et diriger<br />

leurs écoles. De plus, cet enseignement par la société trouverait un excellent correctif<br />

dans la liberté d'enseignement, c'est-à-dire dans le droit naturel qu'a tout indivi<strong>du</strong><br />

d'enseigner ce qu'il sait... Mais pour que tous soient assurés de recevoir cette instruction,<br />

il faut qu'il y ait obligation. Nous concluons donc à l'enseignement par la société<br />

sous la direction des parents et obligatoire pour tous les enfants ; mais nous demandons<br />

quoi qu'il arrive la liberté d'enseignement. »

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