28.06.2013 Views

Le littoral de la Province Nord en Nouvelle-Calédonie: Quel ...

Le littoral de la Province Nord en Nouvelle-Calédonie: Quel ...

Le littoral de la Province Nord en Nouvelle-Calédonie: Quel ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

tel-00641510, version 1 - 16 Nov 2011<br />

Dans l’imaginaire collectif <strong>de</strong>s contin<strong>en</strong>taux, l’île déserte ou peu habitée, alim<strong>en</strong>te tout <strong>de</strong><br />

même <strong>de</strong>s récits pittoresques, folkloriques où se mêl<strong>en</strong>t <strong>en</strong>volées lyriques et beautés. Ainsi, l’île<br />

est vue comme un réel paradis sur terre ! On met alors l’acc<strong>en</strong>t sur les belles vahinés <strong>de</strong>s îles <strong>de</strong><br />

Polynésie se donnant aux navigateurs ! L’île est donc à <strong>la</strong> fois fascinante et elle a une « forte<br />

charge symbolique » (Brunet, R., Ferras, R., Théry, H., 1993, p. 269). De nombreux auteurs<br />

littéraires s’<strong>en</strong> sont inspirés, tels que Bau<strong>de</strong><strong>la</strong>ire, Apollinaire, Ronsard… Souv<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> tous cas,<br />

l’île prés<strong>en</strong>te cette rupture avec le reste du mon<strong>de</strong>. Elle est observée au loin, « abandonnée »,<br />

mais l’esprit du rêveur comme celui du littéraire aim<strong>en</strong>t à s’y attar<strong>de</strong>r, faire une halte, se reposer<br />

avant <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre <strong>la</strong> route…<br />

Pour les îli<strong>en</strong>s, l’île est observée <strong>de</strong> l’intérieur et déjà les dim<strong>en</strong>sions sont faussées, notre<br />

espace m<strong>en</strong>tal étant restreint à celui <strong>de</strong> l’île, quoique aujourd’hui alim<strong>en</strong>té par divers moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong><br />

communications. En effet, tout ce qui nous semble grand, vaste, dans l’espace insu<strong>la</strong>ire, n’est <strong>en</strong><br />

réalité que minuscule, petit, au regard <strong>de</strong>s contin<strong>en</strong>taux. D’où une t<strong>en</strong>dance à l’exagération pour<br />

eux, qui ne nous apparaît pas f<strong>la</strong>grante. À l’inverse, ils insist<strong>en</strong>t davantage sur cet isolem<strong>en</strong>t,<br />

cette fragilité, cette vulnérabilité <strong>de</strong> notre <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, l’île, qui ne nous sembl<strong>en</strong>t pas être<br />

aussi primordiaux. Pour peu que certains ne soi<strong>en</strong>t jamais sortis <strong>de</strong> l’île, vers une autre île ou<br />

vers un contin<strong>en</strong>t et ces s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts sont <strong>en</strong>core exacerbés. Cette opposition <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue,<br />

mêlée à quantité <strong>de</strong> s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts, n’est pas sans poser <strong>de</strong> problèmes quant à l’application <strong>de</strong><br />

politiques <strong>de</strong> gestion, sur <strong>la</strong> préservation <strong>de</strong>s ressources notamm<strong>en</strong>t, pour les futures<br />

générations ! En effet, les priorités <strong>de</strong>s uns ne sembl<strong>en</strong>t pas être celles <strong>de</strong>s autres…<br />

Pour les Kanak dans <strong>la</strong> perception traditionnelle liée à <strong>la</strong> coutume et aux li<strong>en</strong>s ancestraux<br />

<strong>de</strong>s lignages, l’île n’est pas vue comme une rupture avec l’extérieur et isolée, marquée par <strong>la</strong><br />

ligne du rivage (faisant <strong>en</strong> quelque sorte une barrière). Bi<strong>en</strong> au contraire, <strong>la</strong> mer étant <strong>la</strong><br />

continuité <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre, comme nous l’avons dit précé<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t, les divers cheminem<strong>en</strong>ts qui<br />

conduis<strong>en</strong>t à l’ancêtre <strong>de</strong>s c<strong>la</strong>ns lignagers, font le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre l’île et l’extérieur, <strong>en</strong>tre l’île et <strong>la</strong><br />

mer, cette ét<strong>en</strong>due d’eau qui <strong>en</strong>toure <strong>la</strong> terre et au-<strong>de</strong>là <strong>en</strong>tre les îles. Ce li<strong>en</strong> est ét<strong>en</strong>du à<br />

l’espace sacré, qui fon<strong>de</strong> l’espace c<strong>la</strong>nique, organisé comme tel (cf. fig. n° 4). Cette perception<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> sacralité n’est pas propre aux Kanak et existe dans bon nombre <strong>de</strong> territoires, il faut juste<br />

l’observer, et c’est ce qu’a <strong>en</strong>visagé D. Guillemet pour les territoires <strong>de</strong> Belle-Ile-<strong>en</strong>-Mer.<br />

« Deux lieux sacrés bordant <strong>la</strong> mer, <strong>de</strong>ux pèlerinages collectifs, mais <strong>de</strong>ux fonctions différ<strong>en</strong>tes du<br />

sacré. On le voit, Belle-Ile-<strong>en</strong>-Mer est bi<strong>en</strong> un « territoire du plein », du plein d’hommes et du<br />

plein <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s pour ceux qui y viv<strong>en</strong>t. La vacuité <strong>de</strong>s littoraux qu’analyse A. Corbin n’est que celle<br />

supposée par les bourgeoisies occi<strong>de</strong>ntales avant l’affirmation <strong>de</strong> leur « désir <strong>de</strong> rivage » <strong>en</strong>tre 1750 et<br />

1840» (Guillemet, D., 1998, p. 34). Chez les Caldoches, il n’y a pas cette même continuité, le<br />

<strong>littoral</strong> marque bi<strong>en</strong> <strong>la</strong> rupture <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>tités, quoique l’importance <strong>de</strong> <strong>la</strong> partie maritime <strong>de</strong>s<br />

littoraux soit indéniable chez certains (particulièrem<strong>en</strong>t dans l’Extrême <strong>Nord</strong>).<br />

120

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!