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160 LA REFORME DES COURS D'ASSISES EN ALGERIE
pensée des rédacteurs du décret du 24 octobre 1870,
l'institution du jury devait être accueillie avec enthou
siasme en Algérie. Son fonctionnement ne tarda pas, au
contraire, à provoquer le mécontentement de tous, des
colons aussi bien que des indigènes. Les premiers se
plaignirent vite de la charge pénible qu'entraînait pour
eux l'obligation de siéger à des sessions d'assises de
jour en jour multipliées. Quant aux indigènes, ils
témoignèrent pour la juridiction nouvelle une défaveur
marquée. Sous la décevante dénomination de justice
rendue par leurs pairs, elle leur donnait comme juges
des hommes parmi lesquels ne figurait aucun de leurs
coreligionnaires,
et dans lesquels ils étaient disposés à
ne voir guère que des ennemis. Dans ces conditions,
devaient-ils et pouvaient-ils accepter comme un progrès
la juridiction nouvelle dont ils devenaient justiciables ?
Il est difficile de contester le bien fondé des dolé
ances et des plaintes soulevées, dans tous les milieux de
la colonie, par le fonctionnement de la réforme dont
le décret du 24 octobre 1870 a cru devoir doter
l'Algérie. fc
Et d'abord,
que les réclamations des colons soient
pleinement justifiées, cela est indéniable. En réalité,
l'obligation de siéger comme juré est, pour les colons,
une charge écrasante, qui n'a cessé, du reste, de s'ag
graver depuis l'institution du jury dans la colonie. En
1870, en effet, les justiciables ressortissant des cours
d'assises comprenaient 129.000 Français,
115.000 étran
gers et 1.000.000 d'indigènes. En 1880, à la suite de l'ex
tension donnée au territoire civil par les arrêtés de
rattachement de M. le gouverneurgénéral Albert Grévy,