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274 L'USURE ET LA LOI DU 3 AVRIL 1898
entre les indigènes de la région est de 150 pour 100.
D'après le procureur de la République de Bougie, les
Kabyles ne connaissent et ne pratiquent le prêt qu'au
taux de 30, 40,
50 pour 100 et au delà. L'administrateur
de la commune mixte de Souk-Ahras fait connaître que
les indigènes de sa commune empruntent ordinairement
aux Mozabites et aux Kabyles à des taux qui dépassent
75 pour 100. C'est seulement quand ils ont quelque
aisance et offrent des garanties qu'ils trouvent à em
prunter à des conditions plus avantageuses, en s'adres-
sant aux Européens ou aux Israélites. Le général com
mandant la division d'Oran évalue à 200 pour 100 le
taux habituel des emprunts consentis entre indigènes
dans le cercle de Lallà-Maghnia.
Je ne veux pas multiplier les exemples. Ceux que je
viens de citer suffisent à établir que le prêt à très gros
intérêts est de pratique constante chez les indigènes. On
peut même dire que c'est le seul prêt qu'ils connaissent.
Il semble donc que l'application de la loi nouvelle soit
de nature à pourvoir les prétoires correctionnels d'une
ample clientèle, recrute aussi bien du reste chez les
Musulmans que chez les Juifs et les Chrétiens.
Mais, à vrai dire, ce n'est là, je le crains, qu'une
illusion pure et simple, et je serais fort surpris qu'elle
résistât longtemps à la toute-puissance des faits. Et, en
effet, même en France où, de longue date, l'usure est
flétrie et l'usurier méprisé, les textes sont impuissants à
empêcher les prêts usuraires, parce que ceux-ci sont
presque toujours insaisissables. En Algérie, des habitu
des, dès maintenant acquises, rendront la loi fatalement
inapplicable. Presque jamais, en effet, alors cependant