II

LES ERREURS JUDICIAIRES EN ALGÉRIE 29
de rendre nos institutions judiciaires responsables de
la déplorable erreur qui aurait brisé sa vie.
Victime, il le fut peut-être, mais c'est avant tout des
vices de sa race. Tant que nos magistrats ne trouveront
chez les témoins indigènes que duplicité et mensonge,
pourra-t-on, de bonne foi, imputer aux imperfections
de notre procédure et de nos lois les erreurs qui peuvent
en marquer le fonctionnement dans les milieux indigè
nes? Attirer sur ses ennemis les rigueurs de la justice
qui recherche un coupable, les détourner de ses amis, en
tout cas, les égarer,
telle est la préoccupation à peu près
exclusive qui dicte toutes les dépositions. Après cela,
faut-il s'étonner que des incertitudes ou des erreurs
d'instruction attirent parfois sur une tête innocente des
châtiments immérités ?
Un exemple, entre mille, montrera avec quelle im
pudence les indigènes mentent et mentent toujours,
quand il s agit pour eux d'égarer la justice et de la mettre
au service de leurs intérêts ou de leurs vengeances. On
me le citait, il y a quelques jours. L'an dernier, un
caïd du département d'Alger était tué pendant une fête
qui avait attiré chez lui nombre d'indigènes des envi
rons. Immédiatement prévenu, le Juge de paix se rendait
sur les lieux assisté d'un médecin. Le cadavre, encore
tiède, gisait baigné dans son sang,
au pied d'un olivier.
Amis, serviteurs, parents, sepressaientàl'entour, Le Juge
de paix les interroge. Tous sont unanimes. Le vieux
caïd s'est suicidé.
Cette version ne résistait pas au moindre examen du ca
davre. Le caïd était mort, les reins brisés par une balle qui
1 avait frappé par derrière. Mais c'est vainement que le