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les médias sous gorbatchev

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Une télévision pour le président<br />

Voyons maintenant ce qu’il en est de l’autre volet de la réforme, consistant ŕ remplacer<br />

un des speakers par un commentateur. Le but était évidemment de «faire<br />

comme dans <strong>les</strong> meilleures maisons».<br />

Le speaker qui, <strong>les</strong> yeux baissés sur son papier, lisait sans y changer un iota <strong>les</strong><br />

textes impersonnels que quelqu’un avait écrits pour lui s’inscrivait au moins dans<br />

une certaine logique : en tout cas, entre l’image et la parole, l’accord était parfait.<br />

Le remplacer par un commentateur dont on devine que toute liberté de commentaire<br />

lui est refusée a eu le résultat ridicule de réduire son rôle ŕ celui de<br />

speaker. C’est toujours le point de vue de l’Etat, cette entité abstraite, qui est<br />

exprimé, et la seule différence entre le speaker et le commentateur est que ce<br />

dernier est maintenant obligé de faire semblant qu’il s’agit de son point de vue ŕ<br />

lui. En outre, côté présentation, il a du mal ŕ rivaliser avec le speaker qui est, lui,<br />

un professionnel. Ainsi, A. Kroutov qui, avec ses envolées pathétiques serait plus<br />

ŕ sa place ŕ la tribune d’une réunion électorale n’arrive pas ŕ la cheville d’Igor<br />

Kirillov, tombé lui en disgrâce. S’il n’avait pas la prétention de faire de la «télé<br />

d’auteur», Kirillov savait au moins parler distinctement, placer correctement ses<br />

accents et s’insérer exactement dans son créneau sans jamais tre en retard sur<br />

l’image ni la devancer.<br />

Il faut reconnatre en outre que l’émission Vrémia accuse un manque de professionnalisme<br />

de plus en plus évident. A chaque émission du soir, il arrive ŕ ses speakers,<br />

et ŕ plusieurs reprises, d’oublier de brancher leur micro au moment d’ouvrir la<br />

bouche et quand finalement ils le font sur le conseil de quelqu’un que l’on ne voit<br />

pas, ils n’ont pas l’air embarrassé le moins du monde. Pas de doute, dans <strong>les</strong> studios<br />

d’Ostankino, c’est le mme bordel que dans tout le pays. Les pauses inuti<strong>les</strong> qui<br />

ponctuent l’émission en sont une autre preuve : on voit souvent le speaker qui, sa<br />

réplique donnée, reste pendant un moment ŕ fixer l’objectif de la caméra, en attendant<br />

que le technicien se décide ŕ mettre en route le magnétoscope.<br />

Je ne parle pas de ces curieuses expériences avec l’éclairage lorsque <strong>les</strong> jeunes visages<br />

des speakers et speakerines se strient soudain de rides comme ceux de vieillards<br />

ou que s’allume dans leurs prunel<strong>les</strong> cette lueur infernale qui n’est pas sans rappeler<br />

le personnage de L’Exorciste. Du temps de Lapine, ancien chef de la télévision,<br />

<strong>les</strong> auteurs de ces bourdes <strong>les</strong> auraient payées cher. Heureusement pour eux, la<br />

réforme excuse tout...<br />

La valse des speakers et des commentateurs dans l’édition du<br />

soir de l’émission Vrémia n’a rien d’étonnant. On comprend qu’il leur<br />

est difficile, dans cette émission qui se fait en direct, de « jouer »<br />

l’indignation devant <strong>les</strong> caméras ŕ propos des « menées nationalistes »<br />

en Lituanie (ou en Géorgie), sachant parfaitement que <strong>les</strong> mmes<br />

événements sont couverts beaucoup plus objectivement par <strong>les</strong> radios<br />

étrangčres et une bonne moitié des journaux soviétiques. Comment,<br />

lorsqu’on est présentateur ŕ la « télévision présidentielle » (censée<br />

exprimer la volonté du président de l’URSS), garder un air sérieux en<br />

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