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les médias sous gorbatchev

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64 Les journalistes au service de la Perestroika<br />

prenaient pas qu’ils donnaient de la tte contre un mur infranchissable. Je me<br />

trompais donc.<br />

Quand j’ai commencé ŕ travailler, ŕ l’âge de 18 ans, dans un journal de district, je ne<br />

transigeais pas avec ma conscience en écrivant chaque jour, avec abnégation, des<br />

artic<strong>les</strong> et des reportages.<br />

A cette époque-lŕ, quand je travaillais déjŕ dans un journal de région, je me rendais<br />

presque chaque jour dans des usines, dans <strong>les</strong> champs et des fermes. Le chef de la<br />

rédaction aimait <strong>les</strong> notes critiques, et je <strong>les</strong> apportais, flagellant ceux qui n’achevaient<br />

pas ŕ temps <strong>les</strong> semail<strong>les</strong> ou la moisson, qui ensilaient trop lentement ou laissaient<br />

tomber une poignée d’épis. Bientôt, j’étais sűr de comprendre la vie ŕ la campagne<br />

mieux que tout agronome ou vétérinaire. Je leur enseignais comment travailler : je me<br />

le rappelle avec honte. Comme un véritable instructeur du comité de district du parti<br />

ou un inspecteur du contrôle populaire, je <strong>les</strong> voyais constamment exercer leurs activités,<br />

et je semonçais aussi bien un président du kolkhoze qu’un expert pour leurs<br />

erreurs, leur incurie. Et, croyez-moi, ils enduraient le tout humblement.<br />

Volodia Poliantchev, un camarade plus âgé que moi, me demandait souvent avec<br />

ironie : « Toujours ŕ brandir le sabre, hein ?» ; je répondais affirmativement, plein de<br />

dignité. Avec le temps, j’ai commencé ŕ me prendre pour un chef, un chef peu<br />

important, mais quand mme un chef ŕ l’échelle du district, puis de la région. Mes<br />

critiques entranaient des réactions : <strong>les</strong> coupab<strong>les</strong> étaient punis, parfois mme chassés<br />

de leurs fonctions. Dans <strong>les</strong> milieux journalistiques, c’est une réussite particuličre<br />

que d’obtenir la révocation de quelqu’un.<br />

Les journalistes comprennent trčs vite ce qui leur est permis et ce qui est interdit. Tu<br />

peux critiquer un concierge, mme un gérant, un chef du parti, si ses supérieurs le<br />

critiquent eux aussi. Mais Dieu te garde de t’attaquer ŕ quelqu’un qui est bien en<br />

cour ! Et ne touche jamais, en aucune circonstance, aux assises, aux fondements du<br />

Systčme ! Ces rčg<strong>les</strong> n’étaient pas écrites, mais chaque journaliste <strong>les</strong> savait par<br />

coeur et <strong>les</strong> respectait. Nous étions convaincus qu’il le fallait au nom des intérts<br />

suprmes du parti.<br />

Le censeur intérieur est plus fort que le censeur officiel. Avec ce dernier on peut discuter,<br />

essayer de lui démontrer quelque chose, trouver un compromis, ou se plaindre<br />

ŕ ses supérieurs. Bien que tout cela n’ait généralement aucun résultat. Le<br />

censeur intérieur, ce sont tes propres convictions inculquées par le Systčme. Je citerai<br />

un seul exemple, bien que j’aie travaillé prčs de 25 ans <strong>sous</strong> l’oeil vigilant de<br />

mon censeur intérieur et si bien que je ne me rappelle aucun cas d’ingérence du<br />

Glavlit, la CENSURE officielle.<br />

Au printemps 1982, je me suis rendu en Ouzbékistan comme envoyé spécial de la<br />

Pravda aussitôt aprčs la visite de Brejnev dans cette république. Il me fallait raconter<br />

comment <strong>les</strong> cultivateurs de coton s’étaient précipités avec une double énergie pour<br />

exécuter <strong>les</strong> instructions de Léonide Ilitch. J’ai appris des détails du voyage du » chef»<br />

de la bouche de Mou-kimov et de Gladkov, qui étaient ŕ l’époque correspondants<br />

particuliers de la Pravda. On transportait cette momie vivante dans Tachkent avec

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