les médias sous gorbatchev

430 L'opinion publique en URSS
schémas des manuels». L’opinion publique contiendra sűrement des avis diamétralement
opposés car la vie mme est contradictoire.
Cette évolution de la conscience de masse peut tre considéré comme l’un des principaux
résultats de la perestroka.
Le peuple s’éveille. Le peuple s’éveille et sa voix, qui n’est pas plaisante, ressemble ŕ
celle d’un ours réveillé en plein hiver. Il ne parat éprouver aucune gratitude ŕ l’égard
de celui qui l’a réveillé.
L’une des premičres et des plus importantes questions qui se posent est de savoir
quel peuple nous sommes ? Nagučre, dans tous les rapports de la période dite de
stagnation, on disait : Tous les peuples soviétiques, qui ne font qu’un...» A présent,
cette unité n’existe plus. Avec une rapidité inoue, les peuples soviétiques ont fait
connatre leurs revendications en exigeant le droit ŕ l’auto-détermination et ŕ
l’indépendance. Ce processus s’accompagne d’apparition d’antagonismes entre
certains peuples, entre les républiques fédérées et le pouvoir central.
C’est dans la critique qu’il y a le plus de points communs : dans diverses régions du
pays, dans les pays baltes, en Russie, en Asie centrale, en Tranacaucasie et en
Ukraine, les gens rejettent le totalitarisme, quels que soient les masques sous
lesquels il se cache. Dans l’ensemble, les Soviétiques s’opposent au retour au stalinisme
- mais il y a des nostalgiques de la «main de fer», entre 5 % et 20 % selon les
républiques. Cela ne signifie pas pour autant qu’aucune des républiques soviétiques
ne puisse retourner ŕ un totalitarisme hybride sous forme d’une dictature ou d’une
mafia, mais l’aspiration des peuples ŕ la démocratie ne fait plus aucun doute.
Les Lituaniens et les Tchouktches, les Russes et les Moldaves sont unanimes ŕ se
montrer de plus en plus mécontents de leur situation matérielle, de la pénurie des
produits et de la hausse des prix. On fraternise dans la pauvreté et mme si c’est un
mauvais dénominateur commun pour l’unité des nations et pour la fédération, cela
permet au moins de trouver un langage commun dans la recherche d’une issue dans
cette impasse.
Dans toutes les régions du pays, les Soviétiques considčrent la présente situation
économique comme une crise (56 %), leur niveau de vie comme bas, et les espoirs
de voir progresser l’économie soviétique comme faibles. Ils sont 60 % ŕ craindre
pour le succčs de la réforme économique. Et plus de la moitié des Soviétiques estiment
que le gouvernement n’a pas de programme d’action clair et net.
Cela ne relčve plus du nihilisme. Cela reflčte une autre tendance importante de
l’opinion publique, ŕ savoir la crise de confiance dans les autorités. Depuis le régime
de Khrouchtchev cette méfiance devenait de plus en plus prononcée. Le XXe congrčs
du PC US et le «dégel» des années 60 ont quelque peu diminué la peur et les
Soviétiques ont commencé ŕ réfléchir ŕ la situation, ne fut-ce qu’entre amis, dans
leur cuisine - et depuis lors, le processus ne s’est plus arrté. Plus le régime devenait
mensonger et hypocrite, plus l’appréciation qu’avait la population des autorités
devenait critique et cynique. Aujourd’hui, ce récipient qui contenait jusqu’ici
l’opinion publique en ébullition déborde. Pour la premičre fois de l’histoire sovié-