Inégalités et discriminations - Le Monde
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d’action avec des distinctions effectuées à des fins de connaissance. Or le Conseil<br />
constitutionnel use d’une formule générique : « les études sur la mesure de la diversité<br />
des origines, de l’intégration <strong>et</strong> des <strong>discriminations</strong> », qui englobe aussi bien les enquêtes<br />
des organismes d’études ou de recherche que les sondages des instituts privés<br />
(lesquels seraient donc inconstitutionnels dès qu’ils mentionnent la couleur de la<br />
peau ou les origines <strong>et</strong>hniques : une conclusion radicale que personne n’a osé tirer).<br />
Si le juge constitutionnel avait uniquement à l’esprit le traitement des fichiers de<br />
gestion susceptibles de modifier le sort des personnes, que ne l’a-t-il exposé en toute<br />
clarté ? Est-il raisonnable de penser qu’il m<strong>et</strong>tait hors de cause les études anonymes<br />
menées à des fins de recherche ou d’évaluation, sans égard au fait qu’elles interdisent<br />
tout r<strong>et</strong>our individuel sur les fichiers ?<br />
Il est difficile de souscrire à c<strong>et</strong>te interprétation, car elle reviendrait à soutenir<br />
qu’au sein de l’article 8 de la loi Informatique <strong>et</strong> libertés, seule serait conforme à la<br />
Constitution l’interdiction de principe du traitement de données sensibles relatives<br />
aux origines <strong>et</strong>hniques <strong>et</strong> raciales, tandis que les dérogations prévues par le même<br />
article ne le seraient pas. Une interprétation aussi radicale ne tient pas. Dans une<br />
décision de juill<strong>et</strong> 2004, le Conseil avait examiné la transposition de la directive de<br />
1995 dans la nouvelle loi Informatique <strong>et</strong> libertés. Il avait rej<strong>et</strong>é les objections<br />
soulevées à l’une des dérogations de l’article 8. Si les autres dérogations avaient<br />
manifestement violé une norme constitutionnelle aussi fondamentale que celle<br />
énoncée par le 1 er article de la Constitution, il n’eût pas manqué de saisir l’occasion<br />
de c<strong>et</strong> examen pour le déclarer obiter dictum <strong>et</strong> « en tout état de cause ». Il ne l’a pas fait.<br />
Il devient difficile, dès lors, de conclure que la CNIL n’aurait cessé de violer la norme<br />
constitutionnelle depuis quinze ans.<br />
Des données objectives aux données subjectives : le commentaire en deux temps des<br />
Cahiers du Conseil constitutionnel<br />
La décision du Conseil constitutionnel a soulevé des interrogations de fond dans<br />
un autre domaine, qui touche au cœur de l’activité des sciences sociales, les<br />
méthodes d’objectivation des origines.<br />
Dans un premier temps, la décision du Conseil semblait limiter les méthodes de<br />
recherche aux seules données « objectives » : « si les traitements nécessaires à la conduite<br />
d’études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination <strong>et</strong> de<br />
l’intégration peuvent porter sur des données objectives, ils ne sauraient, sans méconnaître le<br />
principe énoncé par l’article 1 er de la Constitution, reposer sur l’origine <strong>et</strong>hnique ou la race ».<br />
Et le commentaire au Cahier de préciser en sa première version : « Ces données objectives<br />
pourront, par exemple, se fonder sur le nom, l’origine géographique ou la nationalité<br />
antérieure à la nationalité française ». Appréhendée au premier degré, la position du<br />
Conseil revenait à reconnaître comme seules réalités objectives les données administratives<br />
consignées sur les documents d’identité des personnes, une vision pour le<br />
moins réductrice de l’identité individuelle.<br />
Aux yeux des chercheurs de l’INED impliqués dans l’enquête TEO, c<strong>et</strong>te dichotomie<br />
implicite entre données « objectives » <strong>et</strong> données « subjectives », scientifiques <strong>et</strong><br />
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