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Inégalités et discriminations - Le Monde

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mais aussi, depuis que l’immigration s’y développe, en Europe du sud. Pour prendre<br />

un exemple entre mille, un chercheur allemand analysant la concentration des<br />

enfants de migrants dans certaines écoles primaires intitulera spontanément son<br />

article : « Ethnic segregation in German elementary schools » même s’il se contente de<br />

repérer l’appartenance « <strong>et</strong>hnique » (turque, balkanique, <strong>et</strong>c.) par le biais de la nationalité<br />

ou du pays de naissance des parents 119 . En France, la situation évolue<br />

rapidement à l’unisson du contexte européen : la Revue française de sociologie a publié<br />

récemment (Pan Ké Shon 2009, Préteceille 2009) deux études fondées sur les données<br />

du recensement de 1999 qui comparent l’intensité de la « ségrégation <strong>et</strong>hnique » à celle<br />

de la « ségrégation sociale » pour conclure qu’elles n’évoluent pas dans le même sens.<br />

« Ethnique » fait référence à la répartition de la population d’après les pays de<br />

naissance des personnes <strong>et</strong>, secondairement, les pays de naissance des parents (pour<br />

les enfants qui vivent encore chez leurs parents). L’un des auteurs est affilié au CNRS<br />

<strong>et</strong> à Sciences-Po, l’autre à l’INSEE <strong>et</strong> à l’INED.<br />

On l’aura compris : en matière d’identification des origines, rien ne distingue les<br />

statistiques INSEE des statistiques communément qualifiées d’« <strong>et</strong>hniques » en Europe.<br />

Dans les deux cas, on écarte le principe d’une appartenance déclarée à une <strong>et</strong>hnie au<br />

profit des données factuelles que sont le pays de naissance <strong>et</strong> la nationalité (de<br />

l’individu ou de ses parents).<br />

LINSEE : des statistiques à la fois <strong>et</strong>hniques <strong>et</strong> républicaines<br />

D’où ce paradoxe qu’il faut toujours expliquer aux collègues étrangers : les adversaires<br />

des « statistiques <strong>et</strong>hniques » en France comptent parmi leurs grands pratiquants ; ils<br />

condamnent en fait la variante forte au profit de la variante faible.<br />

Une illustration remarquable en est fournie par les travaux pionniers d’un<br />

universitaire accueilli à l’INSEE qui portent sur l’acquisition de la nationalité française<br />

<strong>et</strong> la participation électorale des enfants d’immigrés (Richard 1998, Richard 2004). La<br />

source en est l'Échantillon démographique permanent, qui conserve les bull<strong>et</strong>ins de<br />

recensement successifs des mêmes personnes pour un échantillon au 1/100 de la<br />

population française, complétés par les fiches d’état civil. Ayant repéré les jeunes qui<br />

vivaient encore chez des parents immigrés autour de 1975, il suit leur destinée<br />

d’adultes dans les décennies suivantes en groupant les pays de naissance ou les<br />

nationalités antérieures des parents selon un découpage qui n’est évidemment pas<br />

neutre, puisqu’il produit des catégories telles que « les hommes d’origine maghrébine »,<br />

« les femmes d’origine africaine », « les jeunes d’origine asiatique », <strong>et</strong>c. La nomenclature<br />

est finalement très proche du référentiel géo-racial américain (Richard 2004 : 174, 190,<br />

195, 206, 228, 235, passim). Il ne fait aucun doute que de tels travaux, vus de<br />

119<br />

Illustration de c<strong>et</strong>te banalisation, la décision prise par la Société Max-Planck (un des<br />

équivalents allemands du CNRS) de fonder à Göttingen, en novembre 2007, un Institute for the study of<br />

religious and <strong>et</strong>hnic diversity (en allemand : Max-Planck-Institute zur Erforschung multireligiöser and<br />

multi<strong>et</strong>hnischer Gesellschaften), qui compte déjà une trentaine de chercheurs <strong>et</strong> autant de techniciens.<br />

L’une des trois sections est spécialement dévolue à la question des transformations juridiques<br />

nécessaires pour améliorer la connaissance des réalités <strong>et</strong>hniques <strong>et</strong> religieuses en Allemagne <strong>et</strong> en<br />

Europe.<br />

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