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Inégalités et discriminations - Le Monde

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étaient d’aller au plus court : il n’y avait pas de sens à contrôler à l’identique les<br />

deux sexes, dans toutes les tranches d’âge <strong>et</strong> tous les milieux, sachant que les<br />

risques d’infraction étaient inégalement répartis. C’est un raisonnement<br />

typiquement bayésien (le choix du probable doit être guidé par les probabilités<br />

passées). On pourrait soutenir que la police n’a aucunement pour mission de<br />

« représenter » également toutes les catégories de la population ni dans sa propre<br />

composition ni dans son travail de contrôle. À c<strong>et</strong>te objection, les auteurs de l’étude<br />

ont répliqué par anticipation en relevant que le port d’un sac avait beau appeler<br />

une vigilance particulière dans le cadre du plan Vigipirate, il ne déclenchait guère<br />

de contrôle, y compris quand la mesure statistique était faite toutes choses égales<br />

par ailleurs. Or telle est bien la mission qu’on attend de la police dans des lieux<br />

aussi vulnérables que la gare du Nord <strong>et</strong> la station Châtel<strong>et</strong> – les Halles. L’enquête<br />

des chercheurs du CNRS montre que la lutte contre la discrimination « au faciès »<br />

peut se nourrir de données chiffrées sans imaginer pour autant que la police<br />

renonce à ses missions.<br />

<strong>Le</strong>s indicateurs construits sur les ascendances<br />

La principale méthode d’identification des origines dans les données statistiques<br />

(enquêtes, recensement, fichiers administratifs <strong>et</strong> de gestion) consiste à<br />

collecter des informations sur la nationalité <strong>et</strong>/ou le pays de naissance des individus.<br />

Mais l’origine ne se limite à la trajectoire des personnes : elle s’inscrit dans<br />

une généalogie plus longue. La qualification des origines par ascendance consiste à<br />

remonter aux parents, voire aux grands-parents. Méthode relativement simple en<br />

apparence : il suffit de collecter les mêmes informations pour ego, ses deux parents<br />

<strong>et</strong> ses quatre grands-parents. C<strong>et</strong>te forme d’identification, limitée aux pays de<br />

naissance des parents, a été pratiquée pendant plus d’un siècle dans le recensement<br />

des États-Unis (jusqu’en 1970). Elle l’est encore dans la statistique administrative<br />

de l’Europe du Nord, tels les Pays-Bas ou la Suède, fondée sur les registres<br />

municipaux de population.<br />

Pays de naissance <strong>et</strong> nationalité des parents : une apparition récente<br />

dans les enquêtes<br />

Dans le cas français, l’origine des ascendants est identifiée à partir du pays de<br />

naissance <strong>et</strong> de la nationalité. En eff<strong>et</strong>, comme pour la détermination de la<br />

catégorie des « immigrés », celle des « descendants d’immigrés » suppose de pouvoir<br />

distinguer les personnes dont les parents sont ou étaient immigrés de ceux qui,<br />

tout en étant nés à l’étranger, sont Français de naissance. C<strong>et</strong>te distinction peut<br />

sembler subsidiaire <strong>et</strong> excessive mais, rapportée à l’histoire de l’expansion<br />

coloniale française, elle recouvre des catégories de population qui ont été assignées<br />

à des statuts différenciés <strong>et</strong> hiérarchisés. De nos jours encore, ces statuts de l’ère<br />

coloniale exercent des eff<strong>et</strong>s sur leurs descendants.<br />

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